Pour le mouvement des femmes
Dans le contexte de la mondialisation des marchés, revendiquer la revalorisation du travail des femmes à hauteur d’homme, c’est aller à l’envers du mouvement. L’heure est à la flexibilité, à la précarité, à l’exploitation et à la sous-traitance. Alors réajuster le salaire des femmes après comparaison avec celui des hommes c’est penser partage de la richesse et équité au lieu individualisme et appropriation. Il est clair que dans ce contexte, la revendication d’équité salariale ne peut être obtenu par simple négociation et devra faire l’objet de hautes luttes et mobilisation de l’ensemble des femmes. C’est là un premier enjeu.
Pourquoi l’ensemble des femmes ? et c’est là que nous abordons le deuxième enjeu, c’est que tout le poids du travail gratuit des femmes joue comme un boulet au pied de la revendication de l’équité salariale. Comme l’équité est basée sur un réajustement des salaires des femmes dans les ghettos d’emplois des femmes en comparaison des ghettos d’emplois des hommes alors toutes les qualifications des femmes non reconnues et apprises par le travail ménager, le bénévolat, le dévouement aux enfants ou aux aînéEs deviennent maintenant un enjeu dans la revalorisation du travail. De tabou, ces tâches et ces qualifications deviennent reconnues. Si en plus la sphère du privé devient publique, la roue des politiques néolibérales en prend un coup. Cela va à l’encontre des pressions faites aux femmes pour un retour au foyer et pour une accentuation de leur précarité et de leur flexibilité si cher au nouveau moud du travail.
Pour les femmes, il est clair que la revendication de l’équité salariale signifie une égalité dans les droits. Pour un travail d’égale valeur, on paye déjà les hommes à leur valeur alors que les femmes ne reçoivent que 75 % du salaire des hommes. C’est une injustice flagrante qui a des conséquences de plus en plus graves sur les femmes dans le contexte des politiques néolibérales et d’appauvrissement des femmes. C’est une lutte pour les droits et l’équité et la démocratisation de la société. Là est le troisième enjeu.
Pour le mouvement syndical
Comme l’équité salariale vise l’élimination d’une discrimination séculaire relevant de patterns patriarcaux, le mouvement syndical en avait fait une bataille séparée des enjeux de négociation. Et c’est cela qui risque de changer dans les stratégies syndicales et patronales.
Il est clair que le gouvernement ne veut pas accorder l’équité véritable à ses employéEs. Dans un premier temps, il avait tenté d’être dispenser de l’application de la loi sur l’équité prétextant l’avoir accorder en 1989 lors des négos alors qu’en fait il n’avait que rajuster les salaires autour de disporportions trop évidentes (entretien ménager versus commis de bureau). Dans un deuxième temps, il s’est lancé dans un vaste processus de consultation et de compilation des tâches qui ont suscité des attentes réelles dans les bases. Le résultat a accouché d’une souris quand le gouvernement Charest a unilatéralement procédé à un réajustement de quelques dollars (personne ne sait comment les comparaisons ont été effectuées) en juin dernier. Et ce réajustement risque de peser lourd dans les prochaines négos. Le gouvernement ayant acccordé l’équité !!! le mouvement syndical pourra difficilement séparer cette négo avec celle du renouvellement de la convention collective. A moins que le gouvernement, pour obtenir une prolongation de la convention sur 18 mois et une restructuration salariale, reprenne l’équité salariale et accorde certains réajustements pour régler les discriminations les plus flagrantes. Mais le processus séparé de négociation de l’équité salariale paraît fort illusoire à l’heure actuelle. Les deux parties vont s’en servir dans les négos actuelles. La preuve, à la CSN on envisage de ne pas déposer les demandes pour le renouvellement de la négo s’il n’y a pas d’entente sur l’équité. De son côté la partie patronale lance des coups de sonde et parle de décréter les conditions de travail.
Il est clair que le mouvement syndical qui part déjà en ordre dispersé et avec des stratégies différentes d’une centrale à l’autre, ne pourra gagner une véritable équité salariale sans unité d’actions, sans mobilisations et sans soutien populaire. L’enjeu est trop gros mais essentiel pour les femmes et leur autonomie financière et surtout leur égalité dans les droits.
Mais derrière cette joute du chat et de la souris, demeure le processus comme tel soit l’étude des titres d’emplois et des tâches des femmes et leur comparaison avec ceux des hommes. Il faut éviter que ce processus ne soit qu’une restructuration salariale comme en 1989. Car, il ne faut pas l’oublier, la loi de l’équité salariale existe et elle, elle a appliqué partout dans les entreprises du privé des processus de restructuration salariale. Alors l’enjeu dans le secteur public est de forcer pour un réel processus d’équité salariale et faire ainsi jurisprudence pour poursuivre la lutte.
Une lutte contre le patriarcat
L’équité salariale pour toutes ces raisons est un enjeu de taille. Mais surtout il vise le cœur du capitalisme actuel en remettant en cause sa structure patriarcale et en dénonçant les discriminations faites systématiquement et systémiquement aux femmes. Même si l’enjeu est gros, il importe de se mobiliser et d’étendre les appuis et les solidarités. Pour les femmes c’est essentiel. Je dirais même que c’est une question de survie.