Durant les dernières semaines, c’est un véritable mouvement social contre l’arbitraire et l’autoritarisme du gouvernement Charest qui a manifesté sa détermination et sa créativité. .Après la manifestation de plus de 30 000 personnes le 29 novembre à Québec, c’est plus de 30 000 personnes qui ont manifesté pour la défense des Centres de la petite enfance et pour le maintien des tarifs actuels à Montréal le 11 décembre. Ce sont des dizaines de milliers de personnes en provenance de centaines de lieux de travail différents qui sont descendues dans les rues et cela à plusieurs reprises. Les manifestations ont touché le secteur public mais également les travailleuses et travailleurs du secteur privé. Des rues ont été bloquées. La circulation dans les ports a été entravée. Toutes les centrales et syndicats indépendants ont été impliqués dans ces actions.
Les mobilisations du 11 décembre dernier ont démontré la volonté de différents secteurs de la population de défendre des acquis attaqués par le gouvernement Charest. L’accessibilité aux garderies, le droit à la syndicalisation, la possibilité de définir et de défendre les cadres de sa vie syndicale, la lutte contre l’appauvrissement, celui des femmes tout particulièrement, la défense de la démocratie... les enjeux sont multiples et essentiels. Ce n’est pas seulement la place même du mouvement syndical dans la société québécoise qui est remise en question, c’est également l’espace démocratique de l’ensemble de la société civile d’en bas. Et cette remise en question se fait ouvertement au nom du développement de la capacité concurrentielle des entreprises. Bref, c’est dans le mesure où les travailleuses et les travailleurs donneront plus et recevront moins que le Québec pourrait prospérer. C’est cette logique patronale ouverte qui est perçue comme odieuse et qui nourrit la mobilisation.
Pourtant la détermination de Charest ne semble pas encore ébranlée. Tout ce qu’il a proposé, suite aux mobilisations, comme amendements sur la réforme de la réorganisation syndicale dans le milieu hospitalier ne constitue pas des concessions de sa part mais des tentatives d’exacerber les contradictions. Sur les amendements concernant la sous-traitance, Charest ne veut rien entendre. Sur l’essentiel, il s’entête. Il envisage même suspendre les procédures parlementaires pour adopter ces lois anti-syndicales et anti-populaires à toute vitesse.
Sa volonté d’en découdre avec le mouvement syndical part de l’analyse que ce dernier occupe dans la société québécoise une place qui correspond nullement aux rapports de force qu’il peut établir sur le terrain. Dans la logique néolibérale, qui est la sienne, l’affaiblissement du mouvement syndical est essentiel à la relance de l’économie et à la conquête des marchés internationaux. Que cette place se fasse par la concentration des richesses dans les sommets de la société ne semble pas lui faire un pli.
Le président de la FTQ signalait dans un point de presse qu’il avait reçu de plus 125 syndicats de sa centrale la demande lancer le mot d’ordre de grève générale avant Noël. S’il déclare impossible la perspective à court terme, il ne l’écarte pas pour les prochains mois. Il parle plutôt de discuter cette question au prochain Conseil général de la FTQ. M. Henri Massé recommande à Charest de bien "estimer la chaleur de l’eau ". Malheureusement la remise dans un avenir indéterminé de l’appel à la grève générale, -du moins à une journée de grève générale, laisse croire à Charest "qu’il a bien estimé la chaleur de l’eau" et qu’il peut procéder sans trop de dommage à faire adopter ses lois ouvertement pro-patronales.
Jamais le notion de mot d’ordre n’est plus actuel que dans ces moments chauds où chaque jour, chaque heure compte. Le 11 décembre, des enseignant-e-s espéraient dans leurs écoles le mot d’ordre de journée ou de demi-journée d’étude. Des syndicats dans le privé ont même demandé que le mot d’ordre de grève générale soit lancé pour rallier l’ensemble des forces syndicales dans une action commune.
Si ces les projets de loi devaient être adoptés, il faudra se battre pour faire abroger ces lois. Pour faire reculer ce gouvernement conservateur et pro-patronal, il sera nécessaire de consolider l’unité des organisations syndicales, populaires, des femmes et de jeunes au-delà de ce que l’on a connu jusqu’ici. Les moyens d’action devront être encore plus audacieux. La perspective d’une bataille unitaire d’ensemble deviendra incontournable. Un appel à une journée de grève générale par les directions des centrales, des syndicats indépendants et des organisations étudiantes pourrait consolider le ralliement de la population derrière la défense des droits sociaux et syndicaux.
Cette perspective devra être définie le plus tôt possible pour pouvoir compter sur les énergies créées par les mobilisations des dernières semaines.