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Les Amériques

STRATÉGIE DE LUTTE CONTRE LA ZLEA

décembre 2002

STRATÉGIE DE LUTTE CONTRE LA ZLEA

Une condition s’avère essentielle pour juguler la ZLEA, à savoir la mobilisation des peuples. Les tâches et le plan d’action ci-après poursuivent cet objectif.

TÂCHES PERMANENTES

1. Formation de mouvements, comités ou plateformes nationaux unitaires et horizontaux enracinés dans les organisations sociales. Un défi doit être relevé pendant la prochaine période, à savoir articuler et unifier les différents groupements et actions anti-ZLEA de tous les pays en comités ou mouvements nationaux. L’unité doit passer avant les luttes internes et le vedettariat, cherchant à établir dans les organisations sociales une articulation horizontale et efficace favorisant le développement d’actions. Telle est la stratégie fondamentale à suivre pour atteindre une mobilisation nationale et continentale capable de stopper la ZLEA. Les comités, les plateformes ou les mouvements nationaux doivent promouvoir la plus vaste participation des femmes à tous les niveaux et renforcer des comités locaux populaires liés à la base.

2. Mettre à nu le rapport existant entre la dette, la militarisation et le libre-échange. Il faut mettre à nu les liens existant entre ces trois mécanismes de recolonisation. Les accords de libre-échange et les nouveaux crédits sont de plus en plus conditionnés à « la lutte contre le terrorisme », nouveau nom donné à la militarisation de nos pays. À preuve, l’Accord de préférences commerciales pour la région andine (ATPDEA). De même, les instruments financiers, la dette, les plans d’ajustement structurel, les contraintes du FMI, de la Banque mondiale et du BID complètent et consolident les mécanismes commerciaux de pillage de nos pays.

3. Nouvelle phase en matière de monitorage, suivi et surveillance des négociations. Il faut renforcer non seulement le suivi de la teneur du traité, mais encore les propositions de produits, services et engagements contractés par chaque pays dans le cadre des négociations de la ZLEA.

Le monitorage doit comprendre non seulement la ZLEA mais aussi les négociations à l’OMC, les accords régionaux (Plan Puebla Panama, ATPDEA, CAFTA, CBTA...), les traités bilatéraux de commerce et d’investissements et les plans de militarisation (Plan Colombia et installation de bases militaires) et d’endettement extérieur.
Ce monitorage doit se matérialiser aux niveaux continental, mondial, régional et national tout en articulant les différentes initiatives avancées. Il faut continuer d’exhorter les gouvernements à informer publiquement des détails des négociations et à définir les pays visés par les propositions entre crochets figurant dans le brouillon de la ZLEA.

4. Renforcement des mécanismes de communication, diffusion et formation à tous les niveaux. En tant que facteur stratégique, la communication doit faire appel à tous les espaces alternatifs, publics et commerciaux. Il faut tirer profit des médias publics nationaux ou municipaux là où il y a des gouvernements répondant aux intérêts populaires. Les médias commerciaux doivent être exploités aussi au maximum. Il faut renforcer les moyens propres des mouvements sociaux et leur articulation. Il faudra socialiser davantage les différents supports produits dans tous les pays (imprimés, audiovisuels, programmes de radio, CD-Rom, etc.) ; promouvoir la formation de formateurs ou animateurs locaux ; combiner la mise au point de matériaux destinés à être largement diffusés avec la production de textes de fond pour faire face à cette nouvelle phase des négociations de la ZLEA ; produire des matériaux et lancer des campagnes d’information sur des cas spécifiques (San Luis de Potosí, Bechtel, etc.) et les retombées concrètes de la ZLEA sur les gens et la nature et renforcer la communication électronique et l’échange d’expériences et d’actions entre les différentes organisations participant à la campagne continentale.

5. Mise au point de propositions alternatives face à la ZLEA. Les luttes de résistance doivent servir de base à la mise au point de propositions alternatives face à la ZLEA. Une contribution peut être apportée dans ce sens, à savoir le Document d’alternatives pour les Amériques, mis au point par l’ASC. L’objectif des propositions alternatives face à la ZLEA n’est pas de négocier ou de reformer ce traité de recolonisation et de mort mais de mettre sur pied une autre intégration basée sur le respect de la vie, la biodiversité, l’eau et la nature, la défense de nos territoires, la protection des marchés internes et les produits nationaux, la souveraineté alimentaire, la valorisation de la culture et l’identité de nos peuples, la solidarité, la justice et l’équité dans la distribution et l’accès à la richesse, et le respect de la souveraineté de nos pays.

PRINCIPALES PROPOSITIONS D’ACTION

6. Renforcement permanent de la Consultation populaire sur la ZLEA dans tous les pays. La consultation qui a débuté au Brésil et qui se développe actuellement au Mexique, au Québec et au Canada est l’un de nos principaux outils pour informer, mobiliser des millions de personnes et jeter les bases de la légitimité démocratique de notre campagne. La Consultation continentale doit être concrétisée dans tous les pays, la date de tenue devant être ajournée au mois d’octobre 2003. Chaque comité national doit préciser les dates de réalisation de la Consultation populaire. Les résultats de la Consultation sur le plan continental seront présentés dans le cadre de journées de résistance dans tous nos pays lors de la Réunion des ministres qui se tiendra à Miami vers la fin de 2003.

7. Articulation des campagnes contre la ZLEA et l’OMC. Les teneurs de la ZLEA sont aussi présentes dans la nouvelle série de négociations de l’OMC que l’on prétend relancer dans le cadre du Cinquième Sommet des ministres à se tenir à Cancún (Mexique) en septembre 2003. Les axes de cette articulation en un front unique de lutte en sont : la condamnation de la ZLEA et de la nouvelle série de négociations de l’OMC et l’exigence que l’agriculture, les services essentiels et la propriété intellectuelle ne soient pas sous le contrôle de l’OMC ou de toute autre traité de libre-échange. L’échec de cette nouvelle série de négociations de l’OMC encouragera la lutte contre la ZLEA et une victoire dans la lutte contre la ZLEA renforcera la lutte contre l’OMC. Les mouvements nationaux qui luttent contre la ZLEA doivent impérieusement prendre en charge cette tâche. Les organisations qui s’opposent à la ZLEA, pour leur part, doivent s’allier à cette lutte contre la ZLEA et d’autres traités de libre-échange en vigueur dans le monde. Il n’est pas question de lancer deux campagnes parallèles dans le continent américain, mais d’incorporer réellement la dimension de l’OMC dans notre action quotidienne.

8. Journée continentale de lutte contre la ZLEA et l’OMC. Dans cette nouvelle phase, des actions parallèles de mobilisation contre la ZLEA et l’OMC peuvent être menées à bien dans nos pays. Nous convoquons les organisations à une journée de lutte et de mobilisation continentale (marches, grèves, blocage de routes, rassemblements, blocages et fermeture de frontières, entre autres) qui aura lieu le 10 septembre, date du début du Cinquième Sommet des ministres de l’OMC à Cancún. De même, les événements et les actions envisagés pour Cancún par le Comité mexicain contre la ZLEA et autres organisations seront soutenus par la Campagne continentale contre la ZLEA. Nous exhortons les organisations à participer à une série d’activités, avec lesquelles nous nous solidarisons, à savoir la journée continentale contre la militarisation, la journée de solidarité avec Cuba, la journée continentale pour le respect du droit international et autres figurant dans le calendrier d’actions ci-joint.

9. Réalisation de campagnes spécifiques pour renforcer la lutte contre la ZLEA concernant :
i)des aspects figurant dans le brouillon de la ZLEA (investissements, services, agriculture, achats de l’État, etc.) ii) des aspects communs et particuliers à la ZLEA et à l’OMC. Iii) les traités régionaux (PPP, ATPDEA, CAFTA, CBTA...) iv)les traitésbilatéraux et les cas concrets de demandes présentées par des entreprises transnationales contre des États.
Ces campagnes spécifiques permettront d’articuler les forces et les initiatives de mouvements ou comités de différents pays. Il est souhaitable que tous les groupements de pays parties à un même traité régional conjuguent leurs forces et leurs actions. La mise en pratique et la coordination des différentes campagnes doivent être assumées par les acteurs concernés, la tâche de promouvoir et de soutenir ces articulations étant une responsabilité de la Coordination continentale. Le plus grand nombre de secteurs (hommes d’affaires, professionnels, petits commerçants, producteurs nationaux, gouvernements municipaux et autres) touchés par la ZLEA doivent y participer. D’autre part, il faut souligner le rôle des communautés religieuses dans la promotion de ces campagnes.

10. Campagnes à thème concernant les traités commerciaux. Plusieurs initiatives et actions continentales et internationales abordent des thèmes comme l’eau, la dette, la militarisation, les produits transgéniques, l’éducation, les privatisations, les barrages, les zones franches, etc., lesquelles doivent être mieux renforcées et articulées dans le cadre de la campagne contre la ZLEA et l’OMC. Les éléments de genre, d’ethnie et autres doivent soulignés pour montrer les effets concrets qu’auront les traités de libre-échange. L’objectif central n’est pas de créer de nouvelles campagnes mais de contribuer et de renforcer l’articulation des initiatives en cours.

11. Identification et renforcement de l’axe central dans les campagnes nationales. Il y a des problèmes communs à tous les pays attirant l’attention des entreprises transnationales et constituant d’ailleurs des éléments de mobilisation au niveau national (par exemple, gaz, biodiversité, privatisation d’un secteur, barrages, etc.) Chaque mouvement national doit identifier ces axes dans sa campagne et ses liens avec les traités de libre-échange. Sur le plan continental, il est essentiel de concerter des actions de soutien à ces luttes locales pour en assurer l’efficacité. Ce sont précisément ces luttes locales celles qui assureront la victoire contre la ZLEA et les autres traités de libre-échange.

12. Actions parlementaires et juridiques pour renforcer la lutte contre la ZLEA. Les négociations de ce traité violent la souveraineté et les constitutions nationales et ignorent le rôle des parlements et des tribunaux de justice. Il faut établir des liens étroits avec les parlementaires et les juristes liés aux mouvements sociaux de nos pays et entreprendre avec eux des actions parlementaires et juridiques, à savoir demander des rapports, interpeller, déclarer inconstitutionnelles certaines actions et engager des procès, entre autres, pour mettre en évidence l’absence de démocratie dans les négociations des traités commerciaux et essayer d’empêcher la ratification de la ZLEA et d’autres traités commerciaux par les Congrès nationaux. Il est évident, cependant, que la seule action juridique ou parlementaire ne permettra ni de faire échouer la ZLEA ni de négocier ou d’améliorer ce traité.

FACTEURS NOUVEAUX ET CONJONCTURELS

13. Une politique à l’égard des instances et des gouvernements internationaux. Les victoires électorales récemment remportées en Amérique latine mettent en évidence que le modèle néolibéral est de plus en plus condamné. Ces victoires, aussi importantes soient-elles, ne doivent pas nous faire oublier que le renforcement des mouvements et des mobilisations nationales et internationales continuent d’être l’élément essentiel. N’oublions pas non plus que ces nouveaux gouvernements ne sont en mesure ni de corriger ni d’améliorer la ZLEA. Nous ne prétendons pas nous opposer à ces nouveaux gouvernements. L’essentiel c’est de préserver l’unité du mouvement de lutte contre la ZLEA et, selon le pays et le moment conjoncturel, mener à bien les actions les plus adéquates pour soutenir, exiger, faire pression ou demander une position ferme de la part de ces gouvernements face à la ZLEA.
Nous devons exhorter aussi bien les gouvernements nouveaux que traditionnels à convoquer des plébiscites ou des référendums permettant à la population d’exprimer leur accord ou désaccord par rapport à la ZELA et leur opinion sur la participation ou non de leurs gouvernements aux négociations.
Il faut recourir à toutes les instances et conventions internationales (Nations Unies, OIT, PIDESC, etc.) pour dénoncer, mettre en question et entraver la marche des négociations.

14. Actions concertées contre la ZLEA et l’OMC au sein du Forum social mondial. La Coordination continentale de la campagne contre la ZLEA et les mouvements qui luttent contre l’OMC doivent organiser des actions concertées pour consolider les forces pendant le Forum social mondial. L’une des initiatives en est l’organisation conjointe d’un séminaire d’une journée dans le but d’analyser l’approche donnée à des sujets tels que les investissements, l’agriculture et les services, entre autres, dans le cadre de la ZLEA et de l’OMC. Nous devons aussi participer activement à la marche convoquée pour le 27 janvier pour lutter contre le militarisme, la ZLEA, l’OMC et la dette. Nous proposons aussi de constituer un tribunal chargé d’analyser les demandes présentées par les entreprises transnationales contre divers pays, ce qui permettra d’identifier les objectifs des négociations concernant les accords commerciaux.

15. Participation aux rencontres continentales pour consolider les forces. Plusieurs rencontres exigent notre participation décidée en tant que forces continentales de lutte contre la ZLEA, à savoir le Forum social mondial, à se tenir en janvier 2003 ; le Sommet de l’OMC, en septembre 2003 ; la Réunion des ministres de la ZLEA, à Miami, fin 2003 et les Troisièmes Rencontres hémisphériques de lutte contre la ZLEA, qui auront lieu à La Havane du 13 au 18 janvier 2004. Notre participation au Sommet des peuples des Amériques à se tenir en Argentine en avril 2003 et au Forum social mondial hémisphérique qui aura lieu en Équateur en octobre 2003, sera définie lors du Forum social mondial, dans le cadre duquel nous en analyserons les caractéristiques et le bien-fondé, en fonction du calendrier officiel et des rencontres alternatives futures.