« Ce coup de force du gouvernement de Jean Charest est inqualifiable ! La loi spéciale est un pur déni de démocratie non seulement pour les droits des membres de l’Assemblée nationale du Québec, mais pour les droits de l’ensemble des travailleuses et des travailleurs du secteur public. La vraie nature de ce gouvernement néolibéral ne peut être plus exposée au grand jour que par ce geste répressif et délibéré contre les syndiquées et les syndiqués. Pour la CSQ, le 15 décembre 2005 marquera profondément le Je me souviens syndical », a déclaré M. Parent.
Il n’y a pas eu de négociation véritable
Aujourd’hui, force est de constater que le premier ministre et la présidente du Conseil du trésor n’ont, depuis juin 2003, date de l’expiration des conventions collectives dans le secteur public, jamais véritablement négocié. Par cette loi, le gouvernement libéral a réduit à zéro le droit, reconnu par le Code du travail québécois, à la libre négociation des conditions de travail des employées et des employés de l’État.
« Ce gouvernement n’a pas négocié. Depuis juin 2003 jusqu’au 15 décembre 2005, en tout et partout, c’est un paragraphe d’une seule clause qui a été réglé et encore, cette clause ne se retrouve pas dans la loi. Le gouvernement s’est plutôt employé à appeler des blitz de négociation pour se faire bonne presse et à se payer des pleines pages de publicité dans les grands quotidiens sans jamais présenter de compromis sur quoi que ce soit, sans jamais manifester la moindre ouverture, notamment, sur son cadre financier. Cette intransigeance démontre clairement le manque de respect et le mépris flagrant du gouvernement Charest envers celles et ceux qui travaillent à fournir les meilleurs services possibles à la population », a souligné le président de la CSQ.
Bien qu’il y ait eu des ententes de la dernière chance entre huit des neuf fédérations affiliées à la CSQ et les parties patronales, la Centrale ne peut que s’insurger contre cette manière de procéder de la part des négociateurs gouvernementaux. En effet, en se présentant aux tables de négociation le 14 décembre dernier, c’est rien de moins qu’un ultimatum qui a été servi aux négociateurs syndicaux. Vous réglez maintenant ou c’est le décret ! Pour la libre négociation, on repassera.
Il n’y a pas seulement la fin abrupte et unilatérale du processus de négociation qui a fait fi des droits de représentation des syndiquées et des syndiqués du secteur public, la loi spéciale elle-même marque des reculs pour ces derniers.
À titre d’exemple, la loi stipule que si une altération [aux] activités normales (articles 22 et 23) de travail de l’employée ou de l’employé est constatée par l’employeur pour une journée ou pour une partie de journée, l’employée ou l’employé s’expose, entre autres choses, à une perte de salaire (article 32) et à une amende de 100 $ à 500 $ (article 39) par journée ou par partie de journée. Aussi, si ce dernier n’est pas en mesure de justifier son absence ou son arrêt de travail, l’employeur peut appliquer une double coupure de salaire.
De plus, si l’employeur constate une altération au niveau du travail, il doit cesser de retenir toute cotisation syndicale sur le salaire de l’employée ou de l’employé pour une période égale à douze semaines par journée ou partie de journée (articles 30 et 31). Malgré les dispositions prévues au Code du travail eu égard au droit à la liberté d’association, les articles 30 et 31 de la loi spéciale suspendent l’application de la formule Rand. En l’an 2005, il ne s’agit certainement pas d’une avancée pour la reconnaissance des droits des travailleuses et des travailleurs au Québec. Il s’agit véritablement de répression.
Autre élément, encore une fois malgré le Code du travail, l’article 36 de la loi prévoit que s’il n’y a pas un nombre suffisant de salariées ou de salariés qui se sont conformés à leur obligation de fournir leur prestation de travail et qu’un organisme du secteur public le constate, le gouvernement peut adopter un décret pour assurer la prestation de services. Ce décret peut modifier ou supprimer toute disposition de la convention collective pour permettre à l’organisme de combler les postes, embaucher ou modifier l’organisation du travail. L’organisme public peut ainsi passer de façon insidieuse en sous-traitance (scabs) ou en partenariat public-privé. Les effets de cet article et de cette loi sont donc purement de suspendre le droit de grève dans le secteur public jusqu’en 2010.
En plus de ces mesures qui détériorent les conditions de travail des syndiquées et des syndiqués, le gouvernement Charest confirme dans la loi l’appauvrissement des travailleuses et des travailleurs du secteur public. En imposant un gel de salaire pour les deux premières années de leur convention collective, il a impérativement décrété la détérioration des conditions de vie et du pouvoir d’achat de ces derniers.
« Nous sommes face à un gouvernement qui a transformé une institution démocratique comme l’Assemblée nationale en cirque. Il a métamorphosé la bonne gouvernance par des tactiques et des astuces malicieuses. Par son intransigeance, son entêtement et sa triste facilité à briser tout ce qu’il touche, le gouvernement de Jean Charest vient d’imposer, en dehors de toutes les règles normales de négociation, une loi antisyndicale aux employées et aux employés de l’État », a soutenu M. Réjean Parent.
La CSQ réunira, vers la mi-janvier, son Conseil général des négociations afin d’adopter un plan de mobilisation et de résistance à la loi spéciale. Dans un geste symbolique, ce mardi 20 décembre, c’est en marchant à reculons et vêtus de noir que les travailleuses et les travailleurs membres de la Centrale des syndicats du Québec entreront au travail.
Profil de la CSQ et de ses fédérations touchées par la loi spéciale
La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) compte 172 000 membres, dont 110 000 provenant du secteur public. Les fédérations de l’éducation sont la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE), la Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS), la Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPE), la Fédération du personnel de soutien de l’enseignement supérieur (FPSES), la Fédération des enseignantes et enseignants de cégep (FEC) et la Fédération du personnel professionnel des collèges (FPPC). Les fédérations de la santé et des services sociaux sont représentées par l’Union québécoise des infirmières et infirmiers (UQII), la Fédération du personnel de la santé et des services sociaux (FPSSS) et la Fédération des syndicats de professionnelles et professionnels de la santé et des services sociaux (FSPPSSS). La Fédération du personnel de l’enseignement privé (FPEP), la Fédération autonome du collégial (FAC) ainsi que l’Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec (APEQ) sont regroupées en cartel de négociation.
– 30 -