Tiré du site Presse-toi à Gauche
De passage à l’Université Laval, j’ai pu assister à un débat organisé par la CADEUL entre les candidat-es des élections partielles dans Jean-Talon. Vision de survol.
Quatre hommes, une femme, candidate péquiste. Dans cette circonscription à forte composante estudiantine mais dont l’expression politique est celle des résidents moyens- cossus de Sillery et des environs, un seul étudiant, pour Québec solidaire. Une audience peut-être un peu nombreuse pour la conjoncture, disons un peu plus d’une centaine de personnes. Dans la foule, plusieurs camarades ; au vu des cravates qui se tiennent en retrait, nos adversaires ont aussi leurs équipes internes en position. Pas de chahut, le spectacle est bien rodé, et ça roule : questions à la ronde, répliques, et passe.
Dans ce cadre établi s’exprime calmement le discours doctrinal des pouvoirs eux aussi établis. On est loin du rapport de force des mobilisations de 2005. Le dégel des frais de scolarité est de nouveau au programme des trois partis parlementaires, qui se disputent sur la couleur qu’il convient de donner à l’enrobage de la pilule. Pour défendre la gratuité scolaire, il ne reste plus maintenant que Québec Solidaire. Les Verts, au moins, se prononcent pour un meilleur financement de l’éducation, mais critiquent surtout en la matière les tracasseries administratives auxquelles se heurtent les chercheurs et chercheuses dans leur quête de financement.
Questionné par Québec solidaire quant au bien-fondé des propositions actuelles de la ministre de l’éducation sur la gouvernance des Universités, le députable libéral a eu l’obligeance de confirmer que la proposition libérale de la ministre Courchesne signifie bien ce qu’on s’en imagine, à savoir qu’il n’y a pas de raisons pour laquelle une université ne devrait pas être soumise à des gens qui ont l’habitude de la gestion (entendre des gestionnaires d’affaires), et qui « sauront donner l’heure juste au Conseil d’Administration (sic) ». Que l’éducation, justement, ne soit pas une chose (entendre marchandise) comme une autre, n’est aujourd’hui pas plus qu’hier une évidence que l’on puisse tenir pour acquise chez les politiciens bourgeois.
Dans un tel contexte, je doute que cette élection partielle conduise à la première entrée parlementaire pour Québec solidaire. Mais remarquez que l’on ne pourrait en blâmer ni le parti, ni son candidat. Au contraire, il était plus que réjouissant d’entendre le franc-parler de Marc-André Gauthier s’opposer au manque de conviction et à la facilité de ses adversaires, ceux-ci n’hésitant pas à se réfugier dans la lecture de réponses toutes faites, ou à citer longuement leur chef lorsque l’imagination, faut-il croire, venait à leur manquer. Sans blague, on se serait cru, par moment, à l’Église.
Mais face à ces médiocrités, et dans cette conjoncture de recul des luttes sociales, je pense que Québec solidaire gagne à se faire les dents dans ce rôle de parti marginal. Pour moi qui ai été candidat pour l’Union des forces progressistes (UFP) il y a quelques années, je dois dire que la crédibilité du discours du candidat (réponses chiffrées, exemples éclairants, références à l’actualité politique), qui témoigne d’un travail d’équipe en coulisse, la capacité à demeurer sur le terrain des enjeux propres à une perspective de gauche, la présence même dans la salle de camarades dont plusieurs ne sont pas étudiant-es, me semble témoigner comme dirait Lénine d’une véritable accumulation de force dans le parti.
Les gens, qui ne sont pas stupides, doivent constater eux aussi le mûrissement et le renforcement du parti. Dans la mesure où celui-ci demeure fidèle à ses engagements politiques et idéologiques, ce qui n’est possible qu’en gardant le mouvement social comme centre de gravité, il y a du positif dans ce qui se passe en ce moment dans ce véhicule de la gauche politique québécoise. Ne nous attristons donc pas trop des résultats électoraux, si ceux-ci devaient s’avérer décevants. Car comme aurait pu le dire un vieux sage, l’important ce n’est pas le résultat électoral, mais la lutte qui y mène.