Traduction : Ximena Oviedo et Maryse Hakenholz. coorditrad@attac.org traducteurs bénévoles (*)
ZLEA (Zone de Libre Echange des Amériques) - ALCA en espagnol et FTAA en anglais.
A - Equateur - Première Convention Contre la ZLEA
Les organisations paysannes, les peuples et nationalités indigènes et afro-équatoriennes, et les organisations de la société civile du pays, réunies à Quito, les 24 et 25 mai lors de la Première Convention contre la ZLEA sous la devise de "Une Autre Intégration est Possible ", après un processus d’analyse et de réflexion, déclarons :
Que la ZLEA répond à l’intérêt de groupes économiques alliés au capital transnational, aux oligarchies nationales, aux banquiers et gouvernements corrompus, ainsi qu’au Département d’Etat nord-américain et non aux besoins des majorités appauvries de notre Amérique.
Que la ZLEA, loin de résoudre les problèmes sociaux (santé, éducation) les aiguise, car elle détruit la production nationale, génère chômage et migrations, détruit l’économie familiale, génère désintégration familiale et culturelle, déstabilise les démocraties et élargit le fossé entre les majorités dépossédées et les minorités qui ont le pouvoir et, à l’évidence, augmente la dette extérieure.
Que, avec la ZLEA, se constitue un Etat supranational où disparaissent les droits indigènes, les droits du travail, sociaux et de l’environnement.
Que le "Plan Colombie " et l’ "Initiative Régionale Andine " sont le bras armé de la ZLEA qui recherche le contrôle politique et le contrôle des ressources naturelles du continent, et veut nous transformer en une colonie nord-américaine.
Nous décidons :
1. Le refus total de la ZLEA (Zone de Libre Echange des Amériques)
2. Le refus du Plan Colombie ; exiger du gouvernement le départ immédiat des mercenaires de la Dyncorp et des militaires nord-américains de la base de Manta.
3. De nous déclarer en mobilisation permanente contre la ZLEA.
4. De déclarer toutes les organisations présentes lors de cette première convention membres du comité permanent contre la ZLEA
5. De refuser le secret dans lequel sont menées les discussions sur la ZLEA et d’exiger du gouvernement que le peuple soit consulté sur les décisions.
6. De travailler à l’élaboration d’une consultation sur la ZLEA après la réunion de ministres qui aura lieu à Quito.
7. D’organiser les journées de résistance et de refus contre la ZLEA, le paiement de la dette extérieure et la militarisation.
8. De favoriser la formation de comités provinciaux contre la ZLEA.
9. De provoquer un soulèvement national contre la réunion des ministres à Quito en octobre et novembre.
10. D’organiser des actions préalables de mobilisation pour la préparation du soulèvement national (festivals artistiques, et autres formes de diffusion et convocation).
11. De faire un appel à tous les secteurs de la société civile afin d’intégrer la campagne contre la ZLEA.
12. De manifester notre solidarité envers Cuba et le Venezuela.
Pour une autre intégration, pour une vie digne et pour la paix dans la dignité, pour la souveraineté, pour une économie solidaire, pour un environnement sain, pour la souveraineté culturelle, pour une Amérique Nouvelle et Rebelle, nous invitons toutes les organisations nationales et internationales à rejoindre la campagne continentale contre la ZLEA et nous convoquons tous les frères et sours du continent aux journées de lutte et de résistance en octobre et novembre.
La ZLEA ne passera pas Non au Plan Colombie, Non à la ZLEA Oui à la vie.
B - ZLEA : La souveraineté ne se négocie pas !
Par Frei Betto
Ce titre est la devise du "8ème Cri des Exclus " que les pastorales sociales de la CNBB (Conférence Nationale des Evêques Brésiliens) ont mis en avant pour le 7 septembre prochain, en accord avec les mouvements sociaux. Cette date marquera aussi la clôture du Plébiscite National sur la ZLEA (Zone de Libre Echange des Amériques), pendant la Semaine de la Patrie. Comme pour le Plébiscite sur la Dette Extérieure, lancé par la CNBB en l’an 2000, les Brésiliens seront convoqués cette année à se déclarer pour ou contre l’entrée du Brésil dans la ZLEA.
Des 500 grandes entreprises qui possèdent 73% du PIB mondial, 85% ont leur siège aux Etats-Unis, qui abritent seulement 4% de la population mondiale et contrôlent 22% des richesses de la planète. Comme disait Bill Clinton : " si nous voulons maintenir cette part de richesse, nous devons vendre aux 96% de la population restants ". Malgré cela, ce pays doit faire face à un déficit commercial chronique, qui atteint la somme de 2,1 milliards de dollars entre 1985 et 1999.
Aussi, la ZLEA apparaît-elle comme la planche, non pas de salut, mais au moins de soulagement. Les relations commerciales des EU avec l’Amérique Latine sont encore négligeables. D’après Kjeld Jakobsen (Théorie et Débat 50/2002), secrétaire des relations internationales de la CUT (Centrale Unique des Travailleurs), en 1990 à peine 3,6% du total des exportations des EU étaient destinés à notre continent, dont presque la moitié aux pays faisant partie du MERCOSUR. Le Brésil représente à peine 1% du total du commerce extérieur des EU.
Peut-être que la réussite la plus connue du Sommet des Amériques (Cumbre de las Américas) - a déclaré Colin Powell, secrétaire d’Etat des EU, après la réunion de Québec (en avril 2001) -, est le lancement des négociations pour la ZLEA. Nous pourrons vendre des marchandises, de la technologie et des services américains, sans obstacles ni restrictions, dans un marché unique de plus de 800 millions de personnes, avec un revenu total supérieur à 11 milliards de dollars, et qui s’étend de l’ Arctique au Cap Horn (FSP, 22/04/01).
Que gagne le Brésil avec la ZLEA ?
Un bon thermomètre pour savoir si la ZLEA serait positive ou non pour le Brésil c’est l’ALENA qui depuis 1994 réunit le Canada, les Etats-Unis et le Mexique. Les deux pays voisins de l’oncle Sam ont finit par dépendre de lui pour plus de 80% de leurs exportations ; le Brésil pour sa part, le fait de posséder des relations commerciales géographiquement diversifiées, lui permet d’avoir une plus grande marge de manouvre.
Selon Jakobsen, dans les premières sept années de l’ALENA, 800 000 postes de travail ont été supprimés aux EU parce que beaucoup d’entreprises ont déménagé au Mexique à la recherche d’une main d’ ouvre meilleur marché. Les chômeurs, aspirés par le secteur des services ont vu leurs salaires diminuer de 77% par rapport à ce qu’ils étaient dans l’industrie. Au Mexique, le salaire horaire moyen a diminué de 2,10 dollars en 1994 à 1,90 dollars en 1999.
Henry Kissinger a estimé que les relations Mexique-EU doivent servir de modèle pour les négociations avec les autres pays latino-américains. En d’autres mots, la ZLEA signifie la mexicanisation de l’Amérique Latine, la fin du MERCOSUR et par conséquent de notre intégration avec les pays voisins. Tout indique que, si on l’approuve, la ZLEA signifiera l’annexion de l’Amérique Latine à l’empire de l’oncle Sam.
Qui au Brésil gagnerait ou perdrait avec la ZLEA ?
D’après la CUT, les secteurs perdants seraient les secteurs des machines, des équipements, de l’électronique, de la chimie, du meuble, du papier, des finances et des assurances. Les petites et moyennes entreprises brésiliennes perdraient aussi, puisqu’elles exportent seulement 2% de leur production, tandis que les entreprises analogues américaines en exportent 50%. En revanche, seraient gagnants les secteurs de la sidérurgie, de l’alcool, des jus, des textiles, des chaussures et le commerce des produits agricoles, qui vendent déjà aux EU. Mais ils ne seraient avantagés que si les règles antidumping des EU étaient éliminées, permettant ainsi l’accroissement de nos exportations.
L’actuelle politique de flexibilisation des lois du travail, adoptées par le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso, FHC, fait partie des accords avec le FMI, celui-ci a conditionné la rénovation de ses contrats avec le Brésil à l’adhésion sans restriction de notre pays à la ZLEA. Si elle était approuvée, le capital spéculatif aurait pleine liberté pour chercher la meilleure rentabilité dans n’importe quel pays du continent, en augmentant notre pauvreté, en rendant inutile notre industrie et en expropriant nos richesses. En éliminant le contrôle sur les mouvements de capitaux étrangers et en concédant des exonérations d’impôt aux investissements de ceux qui résident à l’ extérieur du pays, le Brésil prépare d’ores et déjà la voie de la soumission aux intérêts de Washington.
Comment rivaliser avec une nation qui, en 2000, a atteint un PIB de 9,9 milliards de dollars ?
La même année, le PIB du Brésil a atteint les 593 000 millions de dollars. Les accords actuels de la ZLEA prévoient l’élimination des droits de douane, mais ils ne disent rien sur l’interdiction de créer des barrières non douanières, comme les EU ont l’habitude d’en adopter pour assurer leur protectionnisme. Ils promettent également d’ améliorer la protection de l’environnement, mais ils n’établissent pas de mécanismes pour éviter qu’une entreprise soit responsable judiciairement des normes de défense de l’environnement, sous le prétexte qu’elles heurtent leurs espoirs de bénéfice.
De même, la création de la ZLEA va intensifier la marchandisation de la nature, en soumettant les écosystèmes et la bio diversité aux lois du marché et aux intérêts transnationaux.
La ZLEA menace la souveraineté des pays du continent. Si elle se concrétisait, les affaires judiciaires seraient plaidées devant des tribunaux internationaux qui, comme les institutions multilatérales, seraient soumis aux pressions des entreprises transnationales. Il suffit de constater l’attitude de ces dernières, à travers l’OMC, quand elles ont fait pression sur le Brésil et l’Afrique du Sud pour que ces pays arrêtent la fabrication des médicaments génériques bon marché, même ceux qui étaient destinés à combattre le SIDA. Entre les vies humaines et les profits, les transnationales penchent toujours du même côté.
Si elle est approuvée lors du 4ème Sommet des Amériques, prévu en avril 2003, à Buenos Aires, et renforcée à partir de 2005, la ZLEA donnera le feu vert pour installer des industries sans prendre en compte l’environnement, pour industrialiser l’agriculture multipliant ainsi le nombre de familles sans terre, pour restreindre l’activité syndicale via la non reconnaissance du droit d’organisation et de négociation collective. Les produits agricoles des EU entreront sur le marché latino-américain dans des conditions de concurrence déloyale ; la terre des peuples indigènes sera encore plus envahie, et ses richesses naturelles pillées ; l’éducation privatisée signifiera aussi une difficulté plus grande pour l’accès à la scolarité de la majorité de la population, les services de santé agiront selon la logique du marché.
Au-dessus de tout, les intérêts des EU
Selon Samuel Pinheiro Guimaraes (Carta Mayor, 6/3/02), il devient impensable de défendre la ZLEA après que le Congrès des EU ait approuvé le TPA (Trade Promotion Authority - Autorisation pour la Promotion Commerciale), ou fast track (voie rapide), qui permet au président Bush de négocier sans consulter le parlement, en plus d’empêcher des modifications dans la législation commerciale du pays, d’exclure une liste de produits agricoles des négociations, de maintenir les subventions à l’agriculture et de considérer la politique de change des pays exportateurs comme préjudiciable à l’économie des EU.
Le TPA est si clairement impérialiste que le ministre de l’Agriculture, Pratini de Morales, l’a critiqué : "C’est le signe que les EU ne veulent pas négocier" a-t-il dit. "Et, s’ils ne veulent pas ouvrir le marché, nous n’allons pas ouvrir le nôtre" (Folha de Sao Paulo, 13/12/01).
La Maison Blanche a été très claire en ce qui concerne la ZLEA : elle prétend ne négocier que les sujets qui intéressent les EU. Cela signifie que resteront en dehors des négociations les sujets que le gouvernement brésilien considère essentiels pour que la ZLEA soit acceptable pour le Brésil, tels que la révision de l’arbitraire législation antidumping et anti subventions des EU, qui affecte les produits brésiliens concurrentiels comme l’acier, et l’élimination des subventions américaines à l’exportation des produits agricoles.
L’ambassadeur Samuel Pinheiro Guimaraes observe que les normes qui régiraient la ZLEA devraient être compatibles avec celles de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), ce qui ne les empêche pas de favoriser la libéralisation générale du commerce des biens et services et les mouvements de capitaux, sans traitement préférentiel pour les entreprises des pays en voie de développement. Par conséquent, la ZLEA serait encore plus favorable aux intérêts des méga-entreprises transnationales, dont les sièges et centres de décision se trouvent physiquement, ainsi que leurs actionnaires, aux Etats-Unis.
Le gouvernement brésilien serait naïf de supposer, que dans le cadre de la ZLEA, il obtiendrait des EU plus de concessions que ce que le Canada ou le Mexique ont obtenu avec l’ALENA. Les difficultés pour pénétrer sur le marché américain seront les mêmes, tout comme la concurrence déséquilibrée face à l’offensive des EU qui implanteraient dans notre pays des entreprises de production de biens et de services. De même la ZLEA enterrerait une fois pour toutes la possibilité pour le Brésil d’avoir une politique souveraine de développement et d’ obtenir un excédent commercial.
Plébiscite sur la ZLEA
Dire NON ! à la ZLEA c’est empêcher que les pays du continent perdent le peu qui leur reste de souveraineté. Nous sommes actuellement 224 millions d’habitants, dont 90 millions vivent en dessous du seuil de pauvreté, c’est à dire avec un revenu mensuel équivalent à moins de 30 dollars américains. En transformant l’Amérique Latine et les Caraïbes en une simple annexe des Etats Unis, tous nos pays seront encore plus soumis aux ingérences de la Maison Blanche, renforçant ainsi la dépendance économique, politique, culturelle, technologique et même monétaire.
Organisez vous aussi un Comité Populaire de la Campagne Nationale contre la ZLEA dans votre quartier, lieu de travail, syndicat, mouvement social ou à votre école, église ou communauté. Et maintenez le contact avec la Campagne Nationale.
Service d’information " Alai-amlatina " Agence latino-américaine d’information Info@alai.ecuanex.net.ec URL : http://alainet.org Contact pour cet article. Rédaction Correo Informativo informativo@attac.org