Un colonel américain ne s’embarrasse pas de formules diplomatiques : « Ce n’est pas une question de si, c’est une question de quand nous engagerons le combat. ».
Il confirme ainsi que, pour l’administration Bush, les recherches des inspecteurs de l’ONU en Irak sont un leurre. Le régime de Saddam Hussein est accusé de détenir, encore, des « armes de destruction massive. » Mais plus les jours passent, plus se confirme le cynisme du gouvernement des États-Unis et de tous ceux qui l’ont appuyé à l’ONU, gouvernement canadien y compris. Pour paraphraser la formule sarcastique d’un quotidien américain : en matière de possession d’armement « il appartient à Saddam Hussein de faire la preuve que les États-Unis ne possèdent aucune preuve » ! Ce raccourci résume bien la façon dont les principes les plus élémentaires du droit international sont triturés par la puissance impériale.
Car des preuves sur les livraisons au régime dictatorial de Saddam Hussein de matériels servant à fabriquer des armes bactériologiques et chimiques, les États-Unis en possèdent. En effet, depuis la visite de Donald Rumsfled (l’actuel va-t-en guerre de Bush junior) à Bagdad en 1983, et jusqu’en 1990, les élites gouvernementales américaines n’ont pas hésité à livrer du matériel militaire et « à double usage » (civil et militaire) à l’Irak.
L’administration Bush sait que la force militaire de l’Irak est dérisoire.
Les « maîtres du monde », pour défendre leurs intérêts, sont prêts à tout : à organiser la torture comme en Afghanistan ou sur la base de Guantanamo où sont encagés des hommes sans statut légal ; à appuyer des régimes dénoncés par toutes les organisations de défense des droits de la personne humaine (du Pakistan à la Turquie, en passant par la Colombie, Israël, l’Arabie saoudite ou encore la Jordanie) ; à soutenir ouvertement les forces qui cherchent à renverser un régime populaire et démocratique au Venezuela, ce pays pétrolier que Washington voudrait placer complètement sous sa coupe.
Les armes US de destruction massive.
En réalité, la guerre américaine -pleine et entière - contre l’Irak est planifiée. Le déploiement des forces militaires américaines et anglaises est en cours. Le calendrier est établi. Les discussions vont bon train à Washington sur les modalités de contrôle de l’Irak après la guerre, sur la façon de payer avec le pétrole irakien les frais de la guerre, sur le type de gouvernement à mettre en place et sur le recyclage de larges secteurs de l’actuel régime irakien.
Les bombardements anglais et américains sur le Sud de l’Irak n’ont fait que croître depuis l’adoption , le 8 novembre 2002, de la résolution 1441 du Conseil de sécurité de l’ONU, résolution ayant trait officiellement, au désarmement de l’Irak.
Un journaliste américain écrit : « Ils (les pilotes) ont utilisé leurs missions sur l’Irak pour bombarder d’autres cibles (que le « postes de commandement ») - un luxe rare pour des pilotes se préparant à une guerre possible. » La mort de civils victimes de ces bombes s’additionne aux effets d’un embargo qui tue en masse.
Les contours de la stratégie impérialiste
Ces constats effectués, une question se pose : quels sont les objectifs déterminants des cercles dirigeants états-uniens ?
La réponse a été énoncée, en septembre 2002, dans le document intitulé « Stratégie de sécurité nationale des États-Unis :
assurer la permanence d’une domination militaire mondiale, incontestée des États-Unis
valider la conduite « d’une attaque préventive » contre tout État ou toute force, considérée comme pouvant porter atteinte aux intérêts américains à l’échelle de la planète (ce que permet l’interminable « guerre contre le terrorisme ») ;
instaurer un statut d’exception pour la puissance américaine : ses « serviteurs » doivent échapper à toute législation nationale.
Cette orientation n’est pas seulement celle de l’administration républicaine actuelle. Elle s’appuie sur les besoins et les exigences du capitalisme impérial américain.
En effet, l’affermissement de leur puissance militaire -donc aussi politique - permet aux États-Unis de poursuivre un type de développement économique qui s’appuie sur l’appropriation de diverses ressources en provenance de tout le globe.
Tout cela ne peut que déboucher sur une recolonisation ouverte d’une grande partie du monde et sur de nouvelles guerres. La politique extérieure des États-Unis constitue une réponse aux graves problèmes qui rongent l’économie et à la nécessité qui en découle d’étendre leur hégémonie planétaire, quitte à mettre en danger le monde.
Les guerres du « complexe militaro-industriel »
Depuis l’année 2000, les commandes d’armement n’ont cessé de croître. Comme le souligne le Wall Street Journal, quotidien lié au grand capital et à l’administration Bush, c’est la plus forte croissance depuis la période de la « guerre froide » (du conflit latent avec l’Union soviétique). Rien d’étonnant dès lors à ce que le « portefeuille de la guerre », c’est-à-dire les actions des firmes qui produisent de l’armement ait connu de bonne performances en Bourse, au moment où le cours des actions des autres firmes connaissent une débâcle. Le Wall Street Journal remarquait : « Alors que le ralentissement de l’économie mondiale est plus long que prévu et a dévasté des secteurs industriels entiers, celui de la défense représente une lumineuse exception. »
Les coûts de la guerre -énormes pour les population qui en sont la cible -représentent les profits de la guerre pour ce vaste réseau de l’industrie d’armement. La militarisation d’un secteur de l’économie est présentée comme une audacieuse course aux « progrès technologiques » dont les armes dites intelligentes sont l’emblème. Et cela au moment même où les forces de ce système non seulement détruisent la planète (réchauffement climatique, pillage énergétique…) mais nient les doits les plus élémentaires de centaines de millions d’êtres humains.
Finalement, les guerres -telle celle de basse intensité menée déjà contre l’Irak - permettent de détruire des armes. Cette destruction est « utile ». Elle permet d’en produire de nouvelles plus sophistiquées - encore plus meurtrières - et de les vendre à l’État, tout en les faisant payer grâce à une ponction sur les revenus des salarié-e-s contribuables qui subissent, en même temps, les effets d’une dégradation des dépenses sociales.
La dictature du régime pétrolier
Le renforcement du contrôle des États-Unis sur les principaux fonds d’énergie (pétrole et gaz naturel ) du monde et sur les territoires ayant une importances stratégique est au centre de la nouvelle guerre contre l’Irak. En ce sens, la continuité avec la guerre en Afghanistan s’affirme. Ce que confirme le récent accord (décembre 2002) entre le Turkménistan, l’Afghanistan et le Pakistan pour la construction d’un pipeline (TransAfghanistan Pipeline) permettant d’acheminer -donc de contrôler- le transfert du gaz (puis du pétrole) d’Asie centrale vers l’océan Indien.
Ce qui intéresse les États-Unis, ce n’est pas prioritairement de mettre sur le marché, à moyen terme, quelque 4 à 5 millions de barils de pétrole supplémentaire. Ils veulent que les firmes américaines (Chevron-Texaco-Exxon…) extraient ce pétrole et qu’il soit transporté dans leurs oléoducs. Et, dans ce but, les ressources pétrolières irakiennes doivent être privatisées.
Pour mener à bien ce pillage, un « changement de régime » est nécessaire. Traduisez : une intervention militaire et la mise en place d’un régime à la botte de Washington.
Les raisons d’agir
Alors que se prépare l’agression contre l’Irak et son peuple, l’État israélien occupe les territoires palestiniens et humilie leurs populations, détruit les récoltes, rase les maisons, emprisonne des milliers de personnes, impose un blocus économique, multiplie les « exécutions ciblées » et les assassinats. Avec l’aide militaire et financière des États-Unis, Israël reproduit, à une échelle plus restreinte, la politique coloniale mise en œuvre par les États-Unis. L’État sioniste échappe à toute sanction du droit international, grâce au veto systématique de Washington au Conseil de sécurité de l’ONU. Les souffrances infligées aux populations d’Irak et de Palestine relèvent d’une politique analogue et l’Alliance Bush-Sharon ne relève pas de la circonstance.
En effet, cette guerre n’est que l’expression la plus extrême d’un système où s’impose le pouvoir d’une infime minorité aussi bien sur les ressources de la planète que sur les richesses produites par des centaines de millions de mains et de cerveaux auxquels est dénié le droit de décider de leur avenir.
Union de Forces Progressistes
Le 18 janvier 2003
Tract distribué dans les manifestations contre la guerre contre l’Irak