Ce que cherchent les grands partis dans les élections européennes qui viennent, c’est moins à défendre leur idée de l’Europe qu’à obtenir un quitus pour leur politique intérieure passée ou une caution pour leur politique à venir.
Si les listes de la droite gouvernementale enregistrent un résultat un peu meilleur qu’aux élections régionales Chirac et le gouvernement Raffarin présenteront cela comme un succès et comme l’acceptation de leur politique antiouvrière.
Si le Parti Socialiste enregistre un résultat comparable à son score des régionales, il affirmera que l’électorat populaire souhaite son retour au pouvoir. Et cela lui servira d’argument pour dire à tous ceux qui aspirent à un changement qu’il suffit d’attendre pour que, dans trois ans, les élections législatives et présidentielle apportent une nouvelle majorité, et un président de gauche.
Et pendant que les dirigeants de ces partis continueront, les uns à gouverner au profit du grand patronat, et les autres à préparer l’alternance avec l’intention de continuer la même politique avec une autre équipe gouvernementale, le patronat continuera à s’attaquer à la classe ouvrière, à multiplier les licenciements collectifs, les suppressions d’emplois, à généraliser la flexibilité, à écraser le pouvoir d’achat des salariés.
Le gouvernement actuel est un des plus réactionnaires, un des plus antiouvriers qu’on ait connus depuis longtemps. Il exécute servilement les ordres du grand patronat. Toutes ses prétendues "réformes", de celle de la retraite à celle de la Sécurité sociale qui se prépare, sont autant d’agressions contre les conditions d’existence des travailleurs.
Il n’est pas possible de tolérer sans réagir que le chômage frappe directement des millions de familles ouvrières et que sa menace pèse sur tout le monde du travail.
Ni que le chantage à l’emploi permette aux patrons d’imposer la précarité, les horaires de travail à leur gré, les cadences de plus en plus usantes sur les chaînes de production.
Ni qu’il ne soit pas laissé d’autre avenir à la jeunesse ouvrière que le chômage ou les petits boulots.
Ni que le pouvoir d’achat des classes laborieuses continue de baisser, alors que les profits des entreprises et la fortune des plus riches continuent d’augmenter.
Ni que la pauvreté ne cesse de s’aggraver dans un des pays les plus riches de la planète.
Tout cela ne cessera que lorsque les travailleurs y mettront un coup d’arrêt. Il n’y a pas d’autre moyen de bloquer l’offensive des patrons, de stopper les mesures antiouvrières du gouvernement qu’une action collective du monde du travail.
Aucune élection ne pourra à elle seule régler ces problèmes. Mais nous pouvons utiliser le scrutin du 13 juin comme une manifestation de notre refus de la politique antiouvrière menée par tous les gouvernements qui se sont succédé, sous la présidence de Mitterrand comme sous celle de Chirac.
Aux élections régionales, plus d’un million d’électeurs, en votant pour les listes Lutte Ouvrière - Ligue Communiste Révolutionnaire, ont refusé d’entrer dans ce jeu, où seuls les ministres changent, mais pas la politique menée, si ce n’est dans le sens de l’aggravation. Eh bien, il faudra que cette fois-ci ceux qui expriment ce refus soient plus nombreux. Il faudra que les trois millions d’électeurs qui, à la présidentielle, avaient choisi, en votant pour l’extrême gauche, de s’opposer à la droite sans cautionner la gauche gouvernementale, renouvellent leur geste et que d’autres les rejoignent.
Voter pour les listes LO-LCR, ce sera se compter parmi ceux qui sont opposés à la dictature des grands groupes financiers, qui sont pour empêcher les licenciements collectifs, qui n’acceptent pas que tous les bénéfices des progrès techniques et scientifiques aillent à une minorité de riches et que la majorité travailleuse finisse par considérer comme une chance d’être durement exploitée car, sinon, c’est le chômage, et c’est pire.
Voter pour les listes LO-LCR, ce sera affirmer qu’il faut préparer la riposte d’ensemble de la classe ouvrière qui permettra demain de faire reculer le patronat et le gouvernement à son service, quel qu’il soit.
Arlette LAGUILLER
Lutte Ouvrière n°1870 du 4 juin 2004
LO : Lutte Ouvrière
LCR : Ligue Communiste Révolutionnaire (Section française de la Quatrième Internationale)