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FORUM SOCIAL MONDIAL DE CARACAS

La révolution en marche et en débat

par Edouard Diago

mardi 7 février 2006

Ce forum social mondial hors du commun aura permis de mettre en lumière la profondeur du processus révolutionnaire en cours au Venezuela, la vitalité du mouvement altermondialiste et l’importance de la solidarité internationale.

La sixième étape du FSM au Venezuela fut une réussite. Le vent de radicalité qui souffle sur le pays a été transmis aux dizaines de milliers de Latino-Américains et aux Européens présents...

L’éternel pronostic de la mort des FSM ou de son absorption par la social-démocratie ne s’est pas produit. Le FSM poursuit son chemin et a pris à Caracas un bon bol d’air rouge. La question de savoir si le FSM doit décider d’actions ou se contenter de débats reste posée. Mais si le FSM ne tranche pas, Chavez, lui, ne s’est pas gêné pour donner son avis aux 15 000 personnes présentes au meeting de vendredi, retransmis en direct à la télévision. En substance, il a pris parti pour l’action face à l’offensive du néolibéralisme et de ses guerres.

Les mouvements sociaux vénézuéliens n’avaient manifestement pas été intégrés au cadre officiel du FSM et la manifestation d’ouverture était à grande dominante étrangère. La principale organisation syndicale, l’Union nationale des travailleurs (UNT) était la grande absente, méfiante que le FSM puisse apparaître comme un événement trop impulsé par le gouvernement.

Mais, en marge du cadre officiel, dans les quartiers populaires, dans les barrios, dans les usines, des liens se sont tissés. La Ligue a profité de cette disponibilité. Les rencontres avec les habitants du barrio La Vega, la visite avec Olivier Besancenot de l’usine SEL-FEX occupée par ses 240 ouvrières, celle du projet culturel Fuerte el Tiuna (autogéré et financé par la municipalité), les discussions dans les rues de la vieille ville où les militants débattaient vêtus de rouge, les coopérativistes, ou encore la participation aux émissions de télé..., tout cela nous permet de confirmer l’importance de l’internationalisme pour résister, puis construire ensemble une société radicalement opposée au capitalisme. Ici, à Caracas, personne ne craint de l’appeler socialisme, et les questions stratégiques sont au cœur des discussions.

Nous avons débattu de ces questions avec des centaines de personnes. Le Parti de la révolution et du socialisme (PRS) fit partie de nos interlocuteurs, aux côtés des militants du projet Nuestra America - Mouvement 13 Avril, de secteurs membres du gouvernement, des organisateurs des missions sociales... Et cela nous a permis d’affiner notre compréhension du processus révolutionnaire à l’œuvre et les formes que doivent prendre nos actions de solidarité et de coopération.

Le Venezuela a pu montrer au monde ses réussites récentes et les immenses défis à venir. Le FSM aura aussi servi à accroître les solidarités directes entre le Venezuela et le reste du monde. La montée de la gauche en Amérique latine, tant en terme de gouvernements que de mouvements populaires, les premières mesures d’Evo Morales et les débats liés à la situation brésilienne auront permis que les questions de la lutte anti-impérialiste ne soient pas que des effets de manche. Elles ont des conséquences immédiates.

La situation latino-américaine est passionnante, pleine de potentialités et de risques. Les potentialités sont liées à l’élévation du niveau de conscience politique des masses. Les risques ? Il y a notamment celui de voir les gouvernements « réformistes sans réformes » prendre le dessus sur les projets plus radicaux et transformateurs du Venezuela et de la Bolivie. Le Brésil de Lula traverse un moment difficile et l’issue pèsera sur l’ensemble du sous-continent. Pour Chavez, il est indispensable que la gauche, même sociale-libérale, gagne afin d’éviter qu’un axe puisse exister entre le géant brésilien et les États-Unis avec ses implications militaires. Sans créer pour autant des illusions sur les capacités de transformation du gouvernement de Brasilia. Comme l’indique en quelques mots Plinio Sampaio, théologien brésilien ayant récemment quitté le PT au pouvoir pour adhérer au Psol, « un des grands problèmes de Chavez, c’est Lula... ».

Edouard Diago

(tiré de Rouge)