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Caracas

La fièvre du changement

par Édouard Diago

dimanche 29 janvier 2006

Du 24 au 29 janvier, le Forum social mondial décentralisé prenait place à Caracas. L’événement devait profiter du processus en cours au Venezuela et, plus largement, de la dynamique à l’œuvre sur le sous-continent.Après une escale en Inde en 2004, c’est au tour du Venezuela d’imprimer sa marque au Forum social mondial (FSM), qui devait se tenir du 24 au 29 janvier à Caracas, avec ses expériences, ses acquis, ses perspectives.

Les résistances latino-américaines devaient converger dans la capitale vénézuelienne, pour chercher un modèle alternatif au capitalisme. L’élection de Evo Morales à la présidence bolivienne souligne, s’il en était besoin, que le sous-continent latino-américain est en ébullition. Mais organiser l’arrivée de dizaines de milliers de participants dans une ville toujours en proie à la polarisation politique n’est pas une mince affaire. Malgré l’aspect chaotique de sa préparation, le FSM de Caracas était teinté, grâce à la « révolution bolivarienne », d’une petite saveur de radicalité dont la gauche internationale a bien besoin Le FSM de Caracas s’est structuré autour de quatre enjeux. En premier lieu, il s’agissait de confirmer l’utilité des FSM dans la dynamique de la gauche internationale. Le processus des FSM s’accroît-il ou, au contraire, ne risque-t-il pas, en refusant de donner des grandes lignes stratégiques, de demeurer un espace de discussion, certes nécessaire, mais insuffisant au vu des enjeux ? Le second enjeu concernait les mouvements sociaux vénézuéliens. Si leur développement a été lié, jusqu’à présent, à l’appui populaire massif au président Hugo Chavez, ils doivent à présent acquérir une plus grande autonomie leur permettant de faire pression sur le gouvernement afin de radicaliser le processus révolutionnaire. Les relations tissées avec leurs homologues du monde entier permettraient, potentiellement, de franchir cette étape. La troisième question avait trait à la consolidation des réseaux de solidarité internationale. Nous l’avons souvent écrit, le Venezuela représente un formidable espoir pour la gauche latino, qu’elle soit paysanne, indigène ou ouvrière. L’aspiration à l’unité latino-américaine face à l’impérialisme trouve au Venezuela une perspective. Sans être un modèle, tant ses caractéristiques lui sont propres, le « processus révolutionnaire » donne de l’air à la gauche radicale, parce qu’il commence à changer les conditions de vie des masses historiquement marginalisées. Enfin, le quatrième enjeu, central pour notre organisation révolutionnaire, concernait le débat sur le socialisme lancé par Chavez au dernier FSM de Porto Alegre. La LCR et la IVe Internationale s’inscrivent de plain-pied dans cette dynamique. Nous avions pour tâche d’organiser deux grands débats. Le premier, intitulé « Cogestion et démocratie participative, des outils pour le changement révolutionnaire ? », devait réunir des syndicalistes de l’Union nationale des travailleurs, des marxistes révolutionnaires du PRS, et des militants de la IVe Internationale. Le second, organisé avec le Projet K, avait pour but d’aborder les résistances et les stratégies pour construire le socialisme avec des organisations révolutionnaires d’autres pays. Notre Internationale est venue au FSM avec un tract intitulé « Oui au socialisme du xxie siècle ! » Partant de l’immense espoir soulevé par les processus actuels latino-américains, il souligne qu’il ne saurait y avoir de « socialisme sans ôter aux capitalistes le droit de décider des priorités de production et de développement. Le socialisme, c’est la décision démocratique de l’usage des ressources naturelles ; de ce qu’on produit, comment et pour qui. C’est aussi un ensemble de valeurs telles que la solidarité, la fraternité, le coopérativisme. Il ne naîtra pas de rien et devra tirer les leçons de l’histoire : la révolution russe trahie par la bureaucratie qui enleva le pouvoir au peuple n lutte, et la conciliation de la social-démocratie avec les capitalistes qui démontra son inefficacité. Avec le Che nous disons donc : “Révolution socialiste ou caricature de Révolution” ».

De Caracas, Édouard Diago

(tiré de Rouge)