Un consensus scientifique établit aujourd’hui la responsabilité de l’activité humaine dans les changements climatiques ; en évaluant entre 1,4 et 5,8 °C l’augmentation du climat, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) tire la sonnette d’alarme. Précisons que cette « activité humaine » n’est pas neutre, elle est la conséquence de choix économiques, sociaux et énergétiques : le capitalisme, depuis ses origines, repose sur l’usage massif d’énergies fossiles, le charbon d’abord puis le pétrole.
Remettre radicalement en cause cet usage des énergies fossiles, c’est remettre en cause le fonctionnement du capitalisme. La stratégie qu’on doit adopter pour contrecarrer la catastrophe annoncée doit partir de ce constat et s’appuyer sur certains principes : justice sociale, satisfaction des besoins, rapports nord-sud équitables, possibilité de développement pour les pays non développés... Or les négociations qui ont abouti à la mise en place du protocole de Kyoto, et ce sera aussi le cas pour celles de Nairobi en novembre, sont marquées par certaines limites. D’une part si Kyoto est appliqué intégralement, l’augmentation de température serait réduite d’environ 0,1 °C. D’autre part, les mécanismes flexibles de Kyoto diminuent la portée du protocole en autorisant l’émission de quantités de gaz à effet de serre par le jeu de la négociation de quotas.
On sait bien que dans les négociations internationales, le jeu des lobbys industriels pèse lourd sur les Etats, qui ont comme premier souci de satisfaire leurs entreprises plutôt que de préserver les équilibres écologiques. Ce qui est à privilégié, ce ne sont pas les solutions techniques (puits de carbone, enfouissement du CO2 ou voitures propres), mais bien la réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre, par la sobriété et l’efficacité énergétiques et le remplacement des énergies fossiles par des énergies propres, dans le bâtiment, l’agriculture, le transport (priorité du rail et de l’eau, limitation drastique des camions, réduction de l’usage individuel de la voiture...) l’industrie (normes contraignantes, reconversion des industries polluantes...). Mais plus largement, des mesures à hauteur des risques nécessitent une planification démocratique à différentes échelles (par pays, continents et à l’échelle mondiale) afin de dessiner une décroissance énergétique globale, mais pas forcément homogène.
Une telle planification, qui n’abandonnerait donc les choix fondamentaux ni au marché ni à des régimes autoritaires, se devrait de définir :
– quelles options énergétiques doivent être poursuivies ou abandonnées
– quelle organisation des transports et de l’industrie doit être privilégiée
– quelles mesures prendre pour réparer les dégâts causés par le capitalisme
– quels besoins de base doivent être pris en charge collectivement par la société
Les mobilisations du 4 novembre doivent être le point de départ pour que de telles questions fassent l’objet de débats et de choix de l’ensemble de la société, sans rester confinées dans les négociations internationales. C’est ce à quoi souhaite contribuer la LCR. Pour qu’un autre monde soit possible, d’autres modes énergétiques et de production, d’autres modes de vie sont indispensables.
LCR (Commission nationale écologie)
* Publié dans "La lettre de la Commission nationale écologie de la LCR", "L’écologie 100% à gauche" n° 16, novembre 2006.