"Arrêtez les privatisations". "Non à la guerre dans le sud-est asiatique". Pour les droits de Dalits (Intouchables)". "La domination par la dette est une violation des droits humains". "Le pouvoir au peuple". "Un autre monde est possible". "Pour une Palestine libre". "Un monde socialiste est possible".
Toutes ses bannières suivies par des foules reprenant ses slogans ont rempli les terrains où se tenait le Forum social mondial à Mumbai. Partout, s’entremêlaient la joie, les chants, les danses de centaines de protestataires du sous-continent où vit le quart de l’humanité.
Des milliers de syndicalistes de Mumbai ont manifesté au Forum lundi. Parmi eux, il y avait des travailleuses et des travailleurs de la construction, des marins, des métallurgistes, des travailleurs et travailleuses du secteur bancaire et des assurances. Ils manifestaient la fierté des travailleurs organisés du plus important central industriel et financier de l’Inde.
Il y a eu certainement des problèmes au Forum social, comme tout événement aussi massif organisé par un nouveau mouvement.
Souvent, seulement le quart des files d’attentes pour les meetings et les forums pouvaient prendre place dans une salle de 5000 sièges. La tribune des orateurs et oratrices laissaient souvent aucune place à la discussion avec la salle. Mais un très grand nombre de petites rencontres corrigeaient ces faiblesses. On pouvait se rendre d’un rassemblement de deux ou trois cents personnes qui, sous une tente, discutaient de la façon de défendre les 90 pour cent de la classe ouvrière indienne qui ne bénéficie d’aucun droit au travail, à un autre où l’on expliquait comment la globalisation avait fait se développer la violence domestique autour du paiement de la dote. Et sur notre route, il y avait une rencontre plus importante sur la paix entre l’Inde et le Pakistan, et un peu plus loin un meeting très réussie de Globalize Resistance de deux ou trois cents personnes sur la globalisation et la guerre.
Cette succession de groupes ajoutaient leurs propres revendications au mouvement qui a émergé il y a quatre ans à peine à Seattle. Ce mouvement a essaimé de Gênes à Porto Alegre et Barcelone avant de fusionner avec le mouvement global contre la guerre.
Maintenant, nous pouvons le voir s’enraciner dans une partie du monde qui a passé près de voir une guerre nucléaire il y a deux ans à peine et qui porte les marques de l’exploitation capitaliste et de l’oppression dans chacune de ses rues.
Le plus important forum a été sans doute celui sur la "globalisation, l’économie et la sécurité sociale". De cinq à six mille personnes ont écouté durant deux heures et demi une tribune sans pareil. Joseph Stiglitz, économiste gagnant d’un prix Nobel alors qu’il était à la direction de la Banque mondiale pour ses critiques des politiques du Fond Monétaire International, était au côté d’économistes anticapitalistes comme Samir Amin d’Egypte et Prabhat Patnaik de l’Inde et de militants comme Trevor Ngwane d’Afrique du sud et du syndicaliste Dita Sari d’Indonésie. Ils ont tous livré des critiques dévastatrices des politiques imposées par le Fond Monétaire International et acceptées par les gouvernements du monde entier.
Il y avait des divergences en ce qui concerne l’alternative. Stiglitz défendait la libéralisation et les marchés, mais sous le contrôle étatique afin d’assurer qu’elle se fasse en vue d’améliorer le niveau de vie des plus pauvres. Patnaik a soutenu que c’était le capitalisme, et non seulement le néolibéralisme qui constituait le problème, mais il situait le combat dans la nécessité d’une intervention étatique beaucoup plus importante. Samir Amin faisait le lien entre le développement du néolibéralisme et les besoins du capitalisme dans une période de crises récurrentes et d’offensive militaire des Etats-Unis. Il appelait à une nouvelle alliance des gouvernements du "Sud" pour mener ce combat.
Dita Sari et Trevor Ngwane insistaient tous les deux que ce n’était pas seulement le combat des peuples dans les zones les plus pauvres du monde. "Le problème c’est le capitalisme, et l’ennemi ce sont les capitalistes, ceux qui dirigent les industries et la finance et ceux qui dirigent les gouvernement capitalistes a dit Trevor. "Nous avons besoin d’un mouvement contre ce qui est infernal, tout comme celui de la guerre contre la guerre de Bush. Nous avons besoin d’actions directes et radicales. Et la principale force dans ce combat est celle qui produit les profits des capitalistes, la classe ouvrière.
Dita a expliqué "comment la globalisation capitaliste" a créé la pauvreté dans de vastes zones du Tiers monde, et que dans le sillage de la pauvreté arrive la guerre et les horribles conflits communaux, ethniques et religieux. Pour les combattre, il ne faut pas seulement des politiques économiques mais se poser la question de l’alternative politique. Et nous devons gagner la solidarité de la classe ouvrière occidentale. Les mobilisations dans les rues de Londres, de Washington, de Rome, de Tokyo est le type de pression dont nous avons besoin. Cela peut nous rapprocher du socialisme qui est un autre monde possible.