Un climat d’insurrection et de désobéissance populaire s’installe dans la région. Et même si son intensité est loin d’être uniforme, le scénario en est l’instabilité et l’ingouvernabilité.
Le caractère transitoire de cette nouvelle période de la lutte de classes est indiscutable, à la mesure du conflit pour les rapports de force qui est loin d’arriver à une conclusion.
Dans de telles conditions, l’impérialisme réorganise sa stratégie de recolonisation, en lançant une offensive qui vise à assurer sa domination en combinant des facteurs autant politiques qu’économiques et militaires.
Les forces militantes de la IVe Internationale agissent avec décision en cette nouvelle période de la lutte de classes. Elles partagent les réflexions et les expériences de lutte des mouvements sociaux, les initiatives des organisations de la gauche latino-américaine, tout comme les dilemmes, impasses et défis auxquels elles s’affrontent. De même, les forces de la IVe Internationale interviennent dans la reconstruction d’une pensée critique, démocratique, libératrice et socialiste. Dans la refondation d’un programme alternatif et d’un horizon stratégique. Avec la perspective d’un regroupement de la gauche radicale.
Le texte qui suit est une introduction au débat dans le cadre de la préparation de notre prochain Congrès mondial, de ses projets de résolution, et des tâches qu’impose la période aux forces révolutionnaires.
1. Réorganisation de la domination impérialiste
1.1 Le vote de blâme de l’ONU (appuyé par la plupart des gouvernements latino-américains) et la rupture des relations diplomatiques de l’Uruguay avec Cuba ; le coup d’État au Venezuela ; l’approfondissement de la guerre en Colombie ; et la destruction économique de l’Argentine pour racheter ce pays au rabais, liquider le Marché commun du Sud (MERCOSUR), et imposer la Zone de Libre Échange des Amériques (ZLEA), marquent une nouvelle phase de l’offensive de l’impérialisme nord-américain sur tout le continent. Avec le Mexique et l’Amérique centrale alignés dans l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) et le plan Puebla-Panama, avec les Antilles soumises au contrôle absolu de Washington, maintenant la bataille principale est livrée en Amérique du Sud.
Cette offensive se renforce depuis les événements du 11 septembre 2001 et la campagne internationale contre le " terrorisme ", mais surtout, après l’ouverture d’un processus révolutionnaire en Argentine et la crise au Venezuela.
1.2 La politique nord-américaine pour la région latino-américaine repose sur trois piliers : le déploiement militaire et la criminalisation de la protestation et des résistances sociales - sous le prétexte de la lutte contre le " terrorisme " ou le " narcoterrorisme " ; une stratégie de recolonisation économique par le biais de la "libéralisation commerciale" totale qui cherche à assurer et élargir les investissements des entreprises nord-américaines et le vol des ressources naturelles par les méga-projets (Amazonie, Patagonie, isthme d’Amérique centrale) ; une redéfinition du rôle des institutions constitutionnelles comme l’Organisation des États Américains (OEA) et le traité interaméricain d’assistance réciproque (TIAR). Cette politique de " sécurité hémisphérique " prétend jouer le rôle de blindage devant la crise de légitimité des classes dominantes locales et agir comme facteur de stabilisation dans un scénario d’ingouvernabilité politico-institutionnelle, de protestation sociale et, dans certains cas, de crise du système de domination.
1.3 Dans ce contexte, les élites au pouvoir se retrouvent subordonnées et ébauchent à peine une moue pathétique de dégoût. Seules les contradictions du Brésil et du Venezuela (42 % du PIB d’Amérique Latine) autour de la ZLÉA, des subventions agricoles, de l’acier et du pétrole secouent les relations des États-Unis avec les gouvernements de la région. Dépendantes du blindage économique impérialiste (marchés nord-américains et européens et des conditions des organismes financiers internationaux comme le FMI, la Banque mondiale, la BID) et attachées aux règles de l’OMC, les élites bourgeoises locales se rendent ou ne font que des demandes timorées pour un " commerce libre mais juste ".
Lors du sommet de Madrid, les gouvernements latino-américains ont encore reçu une gifle. Ils étaient là pour rechercher une " solide association stratégique birégionale " avec l’Union européenne, mais n’ont obtenu qu’un refus en raison d’une " absence d’intégration et de stabilité ", tandis qu’on exigeait de l’Argentine des mesures d’ajustement plus dures et un accord avec le FMI.
Aux réunions de la ZLÉA de Caracas et Panama (mai 2000), les États-Unis ont insisté pour imposer une convergence autour de leurs intérêts, au moment où ils ont augmenté leurs mesures protectrices sur l’agriculture. L’insistance impérialiste s’est centrée sur " la libéralisation des marchés " dans cinq secteurs fondamentaux : les biens industriels, l’agriculture, les services, les achats gouvernementaux et les investissements directs étrangers.
1.4 La réorganisation stratégique des États-Unis s’inscrit dans la double perspective de réalisation d’un processus de libre-échange continental et de répression contre le mouvement populaire. Le déploiement militaire est en marche afin de contrôler - s’il le faut par la force - la mondialisation marchande et les désordres et révoltes sociales qu’elle engendre. L’intérêt stratégique de la région andine fait d’elle une des priorités pour la politique sécuritaire des États-Unis.
Le Plan Colombie (rebaptisé Initiative régionale andine) occupe une place centrale dans le dispositif contre-insurrectionnel. Troisième pays destinataire " d’aide " militaire (après Israël et l’Égypte), et cinquième économie latino-américaine, la Colombie est le laboratoire d’une intervention à grande échelle. Pendant qu’Uribe, le candidat d’extrême droite lié aux paramilitaires, promet l’implication d’un million de civils dans la guerre, armés ou comme " sapos " (informateurs, littéralement " crapauds "), Bush redouble son appui. Déjà, 68 millions de dollars additionnels ont été votés pour la lutte contre le " narcoterrorisme " et en 2003, il y aura 98 millions de dollars pour créer une " armée pétrolière " de mercenaires pour surveiller les oléoducs de l’Occidental Petroleum. Dans leur arrière-cour et pour des raisons de sécurité, les États-Unis ont décidé de ne pas permettre un " État brisé ". Encore moins dans une région riche en pétrole, charbon et mines.
Dans de telles conditions, le Plan Colombie ne vise pas uniquement l’insurrection armée (particulièrement la FARC) et l’ensemble du mouvement social. Il sert aussi comme mécanisme dissuasif contre les résistances populaires en Amérique latine au moment où des scénarios favorables s’ouvrent pour les sociétés multinationales nord-américaines. Et c’est évident que le Plan Colombie ne connaît pas de limites de frontières ni de compétences. Cette intervention nord-américaine n’épargnera aucun pays et ne sera pas modifiée en fonction de tout autre intérêt que celui des États-Unis.
1.5 Comme un élément de ce dispositif militaire, le gouvernement de Panama augmente sa présence militaire dans la zone de Darien et recourt à une clause de l’accord du Canal qui prévoit la possibilité que Washington y envoie des troupes. Des bases militaires ont été mises en place à Aruba-Curazao, Manta (Équateur), Comolapa (Salvador), Tegucigalpa et Palmerola (Honduras), Liberia (Puerto Rico) et Washington a mis en marche l’opération Nouveaux Horizons (Pérou). L’occupation de Vieques (Puerto Rico), le Plan Dignité en Bolivie, l’Opération Cabañas 2001 (Argentine) et l’entraînement de militaires à Concepción (Paraguay) constituent la liste d’un schéma militariste régional qui bénéficie d’un accès exclusif à la base d’Alcántara au Brésil.
La préoccupation nord-américaine de " l’insécurité hémisphérique " s’exprime dans le document de l’État-major de l’armée des États-Unis, "Vision conjointe 2020", publié en juin 2001, qui réitère la doctrine néfaste de " sécurité nationale ". Les militaires nord-américains avertissent des principaux foyers d’instabilité : le " triangle radical " (Colombie, Équateur. Venezuela), le Pérou, le Panama et l’Argentine. De même, dans le document "La Politique des États-Unis par rapport à la Région Andine", mis au point par le Département d’État le 17 mai 2001, on prévoit une injection " d’aide de sécurité sous la forme de Financement militaire étranger, d’entraînement et d’éducation militaires à l’étranger ".
Les États-Unis mobilisent la CIA, la DEA, le Pentagone, les Gardes-Côtes et le Commando du Sud pour mettre en œuvre cette politique d’intervention.
1.6 La stratégie contre-insurrectionnelle continentale s’accompagne d’opérations multilatérales dans la perspective d’une force d’intervention latino-américaine - une sorte de "bras armé" - " antiterroriste " de l’OEA elle-même. En effet, l’aspect institutionnel de cette réorganisation se développe aussi. On revitalise l’OEA et on construit un paradigme de "solidarité démocratique" pour les pays du continent (Charte démocratique interaméricaine, votée à Lima après le 11 septembre 2001) qui articule " la défense des droits humains " et une " bonne gouvernance régionale ". En même temps, les appareils répressifs se modernisent, l’impunité du terrorisme d’État est assurée, et le " nettoyage social " d’éléments jetables (comme en Colombie, Guatemala, Chiapas, Argentine et Brésil) fait partie du combat contre le " crime organisé ", la " contrebande " les " narcotrafiquants ", la " délinquance ", " l’économie illicite " et des " classes dangereuses ".
Cette gouvernance interaméricaine prétend instaurer un droit d’ingérence, qui envoie au rebut les principes de non-intervention et du respect de la souveraineté nationale, très vifs dans des pays dont l’histoire est marquée par les luttes anti-impérialistes et contre les interventions étrangères.
1.7 En même temps, la crise de légitimité et de gouvernabilité des élites bourgeoises, impose des mécanismes et lois de contrôle social et des atteintes aux droits démocratiques de la " société civile ". L’État démocratique assume de plus en plus un caractère policier, autoritaire et de répression contre toutes les manifestations de protestation et désobéissance.
Justement, la crise du " paradigme néolibéral " comme phase actuelle de la mondialisation capitaliste et l’échec de la " modernisation du sous-développement " est un des facteurs clés de cette perte de légitimité et de cohésion du discours dominant. Il n’est plus certain de pouvoir séduire des franges très larges des " classes moyennes " avec le mirage de la consommation. Au contraire, elles passent à l’opposition militante par la mobilisation, les votes de protestation ou l’abstention.
La crise de légitimité et de gouvernabilité a été une constante des dernières années en Amérique latine, ce qui souligne l’instabilité politique dans la région. Cette crise frappe en plein dans la ligne d’eau la " démocratie représentative ". Les institutions ont été mises en faillite par les luttes démocratiques de masse qui ont fait tomber au cours des dernières années des présidents élus, réélus ou imposés par les parlements et congrès : Cubas Grau (Paraguay), Bucaran et Mahuad (Équateur), Fujimori (Pérou), De la Rúa et Rodríguez Saa (Argentine). C’est une autre singularité de l’Amérique latine, où le mouvement populaire a exercé le principe de révocabilité et de démocratie directe, en laissant de côté la délégation de pouvoirs.
1.8 C’est dans ce cadre qu’on impose - sur les plans économique, militaire et politique - une " architecture multifonctionnelle " qui devrait permettre de relégitimiser la suprématie impérialiste.
Les objectifs qui figurent à l’agenda de Washington semblent clairs : écraser la nouvelle montée populaire, l’ampleur de la désobéissance civile et la nature radicale des luttes sociales ; renverser le processus révolutionnaire ouvert en Argentine ; coopter, neutraliser ou directement saboter un éventuel gouvernement Lula au Brésil ; vaincre l’insurrection armée en Colombie et assurer la livraison de son pétrole ; déstabiliser le gouvernement de Chávez - coupable d’un discours nationaliste et d’une alliance avec La Havane ; écraser la résistance zapatiste au Chiapas et des communautés indigènes, les paysans, les habitants et les syndicalistes qui s’opposent au saccage du Plan Puebla-Panama ; poursuivre le blocus et infliger une défaite finale à Cuba ; créer des conditions pour la " stabilité démocratique " qui permettent l’influx sécuritaire des capitaux nord-américains pour les marchés qu’ils disputent avec l’Union européenne.
2. Une crise socio-économique accablante
2.1 La crise socio-économique du " modèle néolibéral " tout comme celle des projets d’intégration régionale subordonnée (MERCOSUR, CAN - Communauté Andine de Nations, Marché commun d’Amérique centrale) s’est accélérée avec le crash financier de 1997-1998, et l’offensive en direction de la ZLÉA.
Même si nous considérons que le dernier mot n’est pas dit à propos de la ZLÉA : d’une part, à cause des nouvelles conditions (protectionnistes) que le Congrès des USA a imposées à Bush par le biais de la Loi d’autorité de promotion commerciale ou la voie rapide (fast-track) ; d’autre part, à cause de l’augmentation de la mobilisation et la protestation sociale contre la ZLÉA.
En même temps, la gravité de la crise non seulement démontre les effets destructeurs du programme de contre-réformes libérales, mais aussi les conséquences brutales d’un projet littéralement néo-colonial imposé aux pays latino-américaines. C’est une des causes qui expliquent la réorganisation de la stratégie impérialiste de domination.
2.2 Ce nouveau pacte colonial implique un transfert gigantesque des divers types de ressources vers les grands groupes impérialistes (sociétés industrielles-commerciales-financières) et vers une minorité de leurs partenaires locaux. Ce projet incorpore une corruption monstrueuse et un parasitisme typique d’une classe dominante qui fait plus confiance à un compte bancaire ouvert aux États-Unis, en Suisse ou dans un paradis fiscal, qu’en son propre pays. Un tel transfert de richesse passe par la destruction de couches sociales entières et par un degré sans précédent de concentration de la richesse, de désastre social, de crise économique et financière et par des récessions toujours plus prolongées.
Le choc implique une destruction industrielle des pays qui - comme l’Argentine - avaient un développement relativement élevé. Les coups d’une mondialisation du capital qui oblige les pays " sous-développés " à contracter leurs économies selon une logique d’ajustement structurel et de paiement de la dette externe, pour satisfaire les exigences des pays impérialistes et de leurs groupes industriels, a détruit le potentiel de la région. Presque tout a été privatisé et ce qui reste est à vendre : réserves d’eau et de pétrole, électricité, terres, mines, ports, services de santé.
2.3 Les causes structurelles de la crise économique sont accentuées par le déséquilibre des quatre grandes transformations qui se produisent dans la région :
1) l’augmentation de l’endettement externe à partir des années 1980 : 709 000 millions de dollars (1999) alors qu’entre 1982 et 1988, 796 000 millions de dollars ont été versés pour le paiement d’intérêts pendant que le paiement du service de la dette compromet l’avenir des nations, comme il accapare 39 % du PIB et 201 % des exportations ;
2) la destruction du tissu industriel dans plusieurs pays, avec le recul de branches industrielles liées au développement (stratégie de substitution des importations) et avec l’implantation de secteurs étroitement liés à la stratégie exportatrice des grandes sociétés transnationales ;
3) la détérioration des termes d’échange, c’est-à-dire, de la valeur respective des exportations par rapport aux importations (déficit des balances commerciales) ;
4) l’augmentation de la pauvreté et de l’inégalité : 44 % de la population latino-américaine est pauvre, plus de 90 millions de personnes survivent avec moins de deux dollars par jour, et 10 % s’approprient plus de 50 % du revenu national. Si, pour le cynisme du Forum économique mondial de Davos et New York, la pauvreté est avant tout " le manque d’information ", les données de la région renversent toutes les supercheries idéologiques des seigneurs de l’argent. En pleine ère d’Internet, presque la moitié de la population latino-américaine n’a pas accès à une ligne téléphonique et la durée moyenne de la scolarité n’est que de 5,2 ans.
2.4 La récession globale touche directement la périphérie latino-américaine : la croissance des exportations a baissé de 12 % à 2 % au cours de l’année passée, l’investissement étranger s’est contracté et la croissance du PIB stagne à 0.5 % (2001), ne pouvant atteindre en 2002 que 1.1 % selon les estimations les plus optimistes.
La débâcle se concentre actuellement en Argentine. La dette externe dépasse la moitié du PIB et équivaut à cinq ans d’exportations : une dette qui a augmenté avec les privatisations scandaleuses. La chute du PIB atteindra les 10 % en 2002, au cours des deux dernières années plus de 3 000 firmes ont fermé leurs portes, le chômage atteint les 20 % et il y a 18 millions de pauvres (dont plus de 4 millions d’indigents). En même temps, les coûts de la dévaluation sont supportés par les salariés, qui ont perdu 40 % de leur pouvoir d’achat.
Ce vol gigantesque de ressource avec transfert net de richesses, expropriation de revenus et privatisation de l’État, fait face, par contre, à une réponse colossale de la part du mouvement populaire et s’accompagne d’une nouvelle période de la lutte de classes en Amérique du Sud.
3. La relance des luttes populaires
3.1 Nous assistons à une relance des luttes populaires de masse, de réorganisation des mouvements sociaux et de reconstitution d’une conscience de classe. C’est-à-dire, le pire moment de recul est derrière nous. Même s’il existe toujours des situations de fragmentation et de confusion, ce processus de franche récupération, de socialisation des diverses expériences de lutte, a un caractère large et radical, en liant des demandes et programmes qui incorporent des contenus économiques, sociaux, démocratiques, écologiques, culturels et ethniques.
L’intox idéologique des attentats contre les Tours Jumelles et la campagne terroriste de l’impérialisme et des pouvoirs médiatiques n’ont pas réussi à arrêter ce mouvement. Au contraire, la polarisation sociale s’est accentuée après le 11 septembre 2001. L’Argentinazo, et le soulèvement populaire contre la tentative de coup d’État au Venezuela, comme l’augmentation des protestations, grèves, et concerts de casseroles massifs en Uruguay, et les luttes toujours plus massives et radicales au Paraguay et en Bolivie confirment cette nouvelle période de lutte de classes.
3.2 Ces luttes des mouvements sociaux portent des programmes et revendications qui acquièrent une visibilité " anti-néolibérale ", tout en s’inscrivant dans une dynamique concrète de caractère anti-impérialiste et anticapitaliste de la résistance.
Des mouvements et des luttes comme celles qui sont menées par la Coordination pour la défense de l’eau et de la vie à Cochabamba, les concerts de casseroles à Chapare et les marches paysannes en Bolivie, la CONAIE en Équateur et le MST du Brésil, les Zapatistes dans le Chiapas, le mouvement développé par le Conseil démocratique du peuple au Paraguay, les enseignants, étudiants et Mapuches au Chili, les habitants de Vieques, les salariés publics et les mouvements populaires en Colombie, les innombrables mobilisations syndicales, paysannes (où Via Campesina joue un rôle moteur fondamental), de travailleurs sans-emploi (l’exemple des piqueteros argentins s’est répandu dans plusieurs pays), le mouvement des Noirs, des femmes, des militants pour les droits humains et contre l’impunité, les étudiants et habitants des quartiers populaires, les radios communautaires, jouent le rôle d’articulation des différentes dimensions de cette résistance qui contient des éléments - bien que partiels - de contre-offensive.
Dans ce nouveau scénario, le resurgissement des peuples indigènes, de leurs organisations et revendications occupe une place à part. Des peuples indigènes qui ont pris la parole contre la commémoration des 500 ans de la conquête de l’Amérique.
Par ailleurs, l’insurrection armée en Colombie se poursuit dans le cadre d’une guerre sans répit et qui a fait des dizaines de milliers de victimes.
Cette nouvelle période de luttes et de prise de conscience démocratique radicale, explique notamment la victoire (provisoire) des masses les plus pauvres contre la tentative de coup d’État au Venezuela. Provisoire, dans la mesure ou le populisme nationaliste de Chávez n’assure pas l’écrasement de la conspiration contre-révolutionnaire, ni l’autonomie des Cercles bolivariens, ni l’auto-organisation des forces radicalement anti-impérialistes qui émergent au sein de la " révolution bolivarienne ".
3.3 Toutes ces luttes - qui ne se limitent pas à la périphérie de " l’exclusion sociale " ou la " déprolétarisation " et ne peuvent pas être décrites comme les luttes d’une " multitude " amorphe et éclectique sans appartenance de classe - embrassent des secteurs de plus en plus larges des classes exploitées et se lient à la croissance d’un mouvement de résistance contre la mondialisation capitaliste, établissent des liens avec les campagnes et les réseaux de solidarité et les grands affrontements contre les institutions financières internationales, et confirment en même temps, l’émergence d’un internationalisme renouvelé (dont l’expression massive s’est exprimée depuis Seattle au Forum social mondial de Porto Alegre).
Dans ce mouvement antagoniste surgit une nouvelle gauche sociale radicale, qui ne réfléchit pas seulement sur " le socialisme de l’avenir " ou " un autre monde possible " mais qui intervient dans la lutte des classes, mène des révoltes, conteste les rapports de force, œuvre quotidiennement pour la construction de " contre-pouvoirs " latents.
3.4 L’Argentinazo a accéléré cette recomposition du mouvement populaire et sa radicalisation. Ce mouvement représente un événement historique décisif dans le cours de la lutte des classes en Amérique latine. Et même s’il ne faut pas sous-estimer la capacité de la bourgeoisie et de l’impérialisme d’organiser une issue contre-révolutionnaire, la force du mouvement populaire est en train de jeter les bases, lentement, de nouvelles formes de démocratie à la base.
Il y a une ligne qui relie la lutte des masses en Argentine (et dans l’ensemble de l’Amérique latine) avec les révoltes de Seattle et de Gênes, avec le mouvement contre la mondialisation capitaliste, comme avec les insurrections, la désobéissance civile, les protestations, et surtout, avec la formidable radicalisation d’une frange toujours plus large de la jeunesse à l’échelle mondiale et, dans le cas de l’Amérique latine, des femmes travailleuses, sans-emploi, chefs de ménage, qui jouent un rôle essentiel dans la recomposition d’une gauche sociale radicale.
L’Argentinazo, à son tour, a renforcé ce climat anti-impérialiste qui constitue la principale menace pour le projet de recolonisation que les États-Unis ont conçu autour de la ZLÉA.
3.5 " L’Argentinazo " a signifié un saut qualitatif dans cette reprise des mouvements sociaux, non seulement comme articulation de la résistance " anti-néolibérale " mais également dans la perspective de la construction d’un mouvement anti-impérialiste et anticapitaliste. De même, il a servi comme facteur clé pour la délégitimation du discours et du programme néolibéral. C’est l’ouverture de ce processus révolutionnaire qui met en question comme rien d’autre, le rôle du FMI et des capitaux transnationaux, la dette externe, les privatisations et la braderie du pays par les élites gouvernantes.
Le processus révolutionnaire ouvert, multiforme, expérience de démocratie directe et décentralisée, permet l’interaction entre les différentes structures qui surgissent : les piqueteros, les assemblées de quartier, les groupes de petits épargnants, de travailleurs des services et des usines. Cette confluence réduit la division traditionnelle entre " salariés ", " sans-emploi " et " classes moyennes ".
Les expériences du mouvement des " piqueteros " et des assemblées de voisins donnent lieu à la possibilité de poursuivre la construction d’un mouvement révolutionnaire, un pouvoir populaire démocratique et de perspective socialiste. La " grande révolte " a mis à l’ordre du jour une stratégie qui lie la résistance et la lutte pour le pouvoir, la démocratie représentative et/ou le principe de révocabilité, les " pillages " pour assurer l’autosubsistance alimentaire. Y compris des expériences d’autogestion ouvrière, voire de questionnement de la propriété privée et du monopole du processus de production.
En Argentine, un immense mouvement de masse, radical et démocratique, a subverti et disloqué tous les mécanismes de représentations politiques et institutionnels. Il a mis en question le monopole de pouvoir étatique capitaliste et, potentiellement, exprime la possibilité d’avancer vers des formes de double pouvoir. En ce sens, l’affirmation de Trotsky assume sa pleine validité : " les masses ne vont pas à la révolution avec un plan préconçu de société nouvelle, mais avec un sentiment clair de l’impossibilité de continuer de supporter la société ancienne. " (traduction indicative seulement, trouver citation).
4. Construire une gauche anticapitaliste
4.1 En Amérique latine, et en particulier en Amérique du Sud, on vit une situation exceptionnelle. L’intensité d’une crise socio-économique et du " modèle néolibéral " se combine avec une crise des institutions (de gouvernabilité) et de la direction politique bourgeoise.
Le processus de contre-réformes a perdu toute sa légitimité politique et idéologique et la nature large et radicale des luttes populaires pose avec plus de force la nécessité d’une " refondation " programmatique dans une direction anti-impérialiste et anticapitaliste.
Dans ce cadre, autant le front uni et l’unité de la gauche que la construction d’une force révolutionnaire avec une implantation de masse et une capacité de direction, sont des tâches fondamentales et immédiates de la gauche radicale. Ces tâches ne peuvent pas être réalisés par " l’auto-affirmation " de " notre identité ".
Les marxistes révolutionnaires qui font partie des différentes organisations, groupes et courants de la IVe Internationale doivent opter, sans hésitations, pour une orientation politique de regroupement de la gauche radicale, d’unité de la gauche révolutionnaire.
4.2 L’extrême polarisation de la lutte des classes aiguise, exacerbe les rapports et les débats au sein de la gauche latino-américaine autour des stratégies à suivre. Et surtout, elle ouvre une brèche entre la simple résistance sociale et un projet politique alternatif.
La question de l’articulation entre la résistance sociale et le projet politique dans une perspective stratégique de pouvoir revient sur la scène avec plus de force et d’actualité. La lecture unilatérale de " réforme ou révolution " cède sa place à l’urgence de réforme et de révolution, pour la " transformation de l’ordre dominant " comme l’avait proposé Rosa Luxemburg.
La distance entre une gauche radicale, dont la nature contestataire ne fait pas de doute, et une autre gauche qui - sans cesser de détenir une base sociale large et aussi de résistance - se situe dans un horizon stratégique de débat institutionnel, se fait plus évidente.
Au moment où celle-là accentue ses accents " résistants " et para-institutionnels, celle-ci se consolide autour de gouvernements municipaux, parlementaires, et en certains cas, comme option électorale nationale. Pendant qu’ellerecule sur les questions programmatiques et s’adapte (même si c’est de manière conflictuelle) aux règles du système de domination, elle se polarise avec la droite sur les " modèles de pays ". Ce cours se confirme chez les principales organisations qui composent le Forum de Sao Paulo.
4.3 Dans la gauche dominante dans les grands partis et fronts, une stratégie politique de conciliation de classes, de " concertation " et d’alliances avec des secteurs d’entreprises " progressistes " ou carrément libérales voit le jour. Le " progressisme " se rapproche de plus en plus du social-libéralisme de la " gauche plurielle ".
Prises dans le syndrome " ni De la Rúa, ni Chávez, mais ni Allende non plus " les directions majoritaires avancent un programme de " modèle alternatif de développement " avec l’accent sur " le social " et " l’éradication de la pauvreté " pour dépasser " le lourd héritage néolibéral " : endettement, dénationalisation, chômage, pauvreté, structure productive dominée par les capitaux transnationaux.
Par contre, dans les programmes, on ne retrouve ni le moratoire sur la dette, ni la renationalisation des entreprises publiques privatisées et des fonds privés de sécurité sociale, ni une réforme des impôts expropriatrice du capital, ni une rupture avec les conditions qu’imposent les organismes financiers internationaux, ni les politiques protectionnistes avec une certaine coupure avec la logique " globalisatrice ". Cette gauche ne s’inscrit pas non plus dans une stratégie de " rupture démocratique " ou de " révolution démocratique ". Ce qui prévaut dans la vision des directions majoritaires est un réformisme sans " réformes structurelles " (dans le sens anticapitaliste qu’Ernest Mandel attribuait à ces réformes).
Au sein de la gauche réformiste prédomine une vision " redistributive " sans mesures radicales de redistribution du revenu et de la richesse.
4.4 Néanmoins, en Amérique latine la dimension de la crise et l’arrogance impérialiste ont acquis une telle magnitude que les espaces pour le " progressisme " s’évaporent. L’expérience désastreuse du gouvernement de l’Alliance en Argentine est l’exemple le plus fort. Et quand un processus timide de nationalisme et de populisme social surgit, comme au Venezuela, la droite, les secteurs réactionnaires de l’Église, les militaires et les multinationales avec l’impérialisme en arrière fond, organisent la déstabilisation.
Cette opération contre-révolutionnaire - qu’on évoque en parlant d’une victoire du Frente Amplio en Uruguay - s’intensifiera si le PT obtient une victoire au Brésil. Peut-être que la droite n’aura pas recours à la force pour empêcher un triomphe électoral de Lula mais pour faire échec à son gouvernement ; par la voie de la déstabilisation et du sabotage, ou en le dénaturant de fond en comble. Pour le moment, les multinationales et les " investisseurs " parlent d’attendre six mois avant de prendre des décisions devant un gouvernement PT. Dans ce contexte, l’évolution de la direction du PT et de Lula, a cessé d’être " contradictoire " et se consolide autour de " l’entente sociale " et d’un programme de " maturité " développiste sans point de rupture avec la logique qu’impose la mondialisation capitaliste et l’impérialisme.
4.5 Une " refondation " programmatique de la gauche latino-américaine ne peut pas se faire en la divorçant des " tâches concrètes " dans une période de radicalisation de la lutte des classes. C’est-à-dire, de l’intervention dans les luttes sociales pour " un autre monde possible " … sans capitalisme ; de liens avec les secteurs populaires qui se radicalisent en questionnant de fait la propriété privée et en construisant des alternatives à la " démocratie du marché " ; de la bataille contre le possibilisme qui imprègne les directions majoritaires de la gauche, et du défaitisme et de la perte de confiance en soi qui imprègnent les forces marxistes et révolutionnaires.
Ce " programme de transition " passe par des questions comme le caractère qu’assume la recolonisation économique et la question de la souveraineté nationale (anti-impérialisme concret) ; la reformulation des processus d’intégration régionale comme la ZLÉA (en proposant un développement réel) ; le non-paiement de la dette ; la lutte contre les privatisations ; la question de la démocratie politique, de la réappropriation des droits confisqués, comme la nature, la portée et limites d’une orientation de démocratie participative au niveau local ou municipal (la gauche latino-américaine gouverne des métropoles comme des petits villages au Brésil, Uruguay, Mexique, Le Salvador, Équateur, Pérou, Colombie) ; la relation entre luttes urbaines et rurales ; la relation entre la résistance sociale et l’organisation politique ; les nouvelles formes qu’assument les " sujets " qui se reproduisent au feu de la fragmentation de la classe ouvrière (piqueteros, assemblées populaires, occupants de terres et de logements, expériences d’autodéfense, quartiers qui luttent pour les services publics, espaces pour les jeunes, pour les femmes qui organisent l’autosubsistance, les différentes expériences d’économie de troc) ; les politiques d’alliances sociales et politiques (dans le cadre d’une proposition programmatique de front uni) ; les options de construction d’organisations de la gauche révolutionnaire.
4.6 Construire une force révolutionnaire avec une implantation de masse et une capacité dirigeante dans le contexte actuel devient une tâche immédiate, justement, parce que la crise elle-même accélère tous les délais. Sans cette force dirigeante, la vitalité de la résistance sociale et la radicalisation d’une avant-garde politique finissent dans un cul-de-sac, en réduisant la potentialité transformatrice à une simple apologie du " rebelle ".
Au Mexique, le mouvement zapatiste n’a pas su traduire sa capacité de mobilisation dans les consultations et les marches, en une alternative politique de gauche. Il n’y a pas eu de modification du rapport des forces. La théorie de " l’anti-pouvoir indéfini " ou de " changer le monde sans prendre le pouvoir " n’a pas produit de processus de réformes radicales, ni de processus révolutionnaire. De toute manière, la crise de toutes les formations et partis politiques au Mexique - accentuée avec l’élection de Fox - s’inscrit dans une recomposition, dans des réalignements et dans un surgissement de nouvelles options. Dans ce cadre il faudrait qu’il y ait, pour être à la hauteur des circonstances, un regroupement et une refondation de la gauche révolutionnaire et socialiste. Un regroupement qui dépasse l’impasse du zapatisme et les tentatives épuisantes d’une " gauche cardéniste " qui cherche à transformer un PRD piégé par la logique de l’institutionnalisme, du clientélisme, de la conciliation, de la corruption et compromis avec la " gouvernabilité ".
En Argentine, l’absence de cette force dirigeante est le plus grand frein. Les différents " trotskysmes " (avec l’exception partielle de certains courants du MAS) utilisent la " crise révolutionnaire " et les différents scénarios de lutte populaire, d’auto-organisation ouvrière, et de démocratie populaire directe, pour s’emparer des assemblées de quartier, créer leurs fronts dans le mouvement piquetero et recruter de nouveaux militants. Sans faire des pas concrets vers une proposition d’unité de la gauche anticapitaliste avec Autodétermination et Liberté (Zamora).
Cette situation tend à favoriser le concept d’horizontalité et les questionnements des organisations politiques de la gauche " traditionnelle ".
En Équateur, la crise et la rupture de Pachakutik et les tendances conciliatrices qui se manifestent au sein de la CONAIE empêchent de profiter de l’énorme potentiel insurrectionnel du mouvement social.
En Colombie, - au milieu d’une guerre - le Front social et politique prend ses distances de la stratégie militariste de la FARC et de l’ELN et se rapproche d’une version social-démocrate renforcée par la constitution électorale du Pôle démocratique.
En Uruguay, le virage à droite du Frente amplio (Front large) a laissé presque seul le Courant de gauche qui, malgré ses faiblesses et contradictions internes, maintient une optique de contestation du réformisme à partir d’une perspective radicale.
4.7 La construction de cette force dirigeante est également décisive pour la lutte contre la stratégie et le programme du réformisme et les tendances social-démocrates et social-libérales de la gauche ; et surtout pour préparer le mouvement populaire à l’affrontement avec la droite bourgeoise et l’impérialisme. Parce que si nous disons qu’il y a une nouvelle montée populaire et une exacérbation de la lutte des classes, nous reconnaissons également les contre-tendances : autoritarisme, reculs démocratiques, répressions sélectives ou massives, déstabilisation de gouvernements de gauche ou populistes-nationalistes, sorties contre-révolutionnaires.
Cette force dirigeante est fondamentale pour favoriser un processus d’auto-organisation massive dont la caractéristique universelle répond à des périodes de mobilisation intense et prolongée. Et aussi, pour organiser l’auto-défense des luttes et critiquer les illusions réformistes du " changement " institutionnel sans affrontement et sans violence.
4.8 Nous sommes pour la construction d’un noyau dur de la gauche et des mouvements résistants et " antagonistes ". Cette perspective ne peut pas se construire à partir d’une pathologie groupusculaire ni en évacuant la pensée stratégique et les initiatives audacieuses au nom de la défense de " notre identité " quatrième-internationaliste.
Les cadres militants de la IVe Internationale décidés à jouer un rôle dans la construction de cette force dirigeante font face à une double tâche.
D’une part, contribuer à maintenir et à renforcer l’unité des forces de gauche et populaires (dans un sens large) ; intervenir dans la construction ou reconstruction d’un camp de gauche comme alternative aux courants conciliateurs dans les formations d’unité large (PT, Frente Amplio, Frente Social y Político) sans perdre de vue l’hypothèse de crises et ruptures de cette gauche large à mesure que son programme et sa stratégie heurtent la nature radicale des résistances sociales et les demandes populaires.
En même temps, et bien qu’avec avec des rythmes et des dimensions différentes, il y a une perspective de regroupement de la gauche révolutionnaire comme expression de la nature radicale des résistances sociales. Cette perspective de regroupements politiques radicaux s’exprime dans des expériences nouvelles comme le Courant de gauche (CI, Uruguay), Présents pour le socialisme (Colombie), le Front socialiste (Puerto Rico) et la Convergence populaire socialiste (Paraguay).
Ces expériences permettent aussi d’enrichir l’accumulation politique et programmatique propre à la IVe Internationale quand elles réussissent à établir une relation d’aller-retour, d’échange et de propositions et tâches communes pour la réflexion et l’action.
4.9. Dans le cadre de la crise et des luttes sociales, les forces de la IVe Internationale ont un rôle actif à jouer. Elles font la promotion et en plusieurs cas organisent ces luttes populaires quotidiennes. Elles participent à toutes les mobilisations, campagnes de solidarité, réseaux et forums qui expriment les différentes expériences de résistance, comme aux espaces de réflexion des expériences sociales et d’élaboration programmatique comme le Forum social mondial. Mais aussi à ATTAC, à la Marche mondiale des femmes, au Bloque contre la ZLÉA, aux campagnes pour le non-paiement de la dette externe et contre le plan Colombie, au Forum de Sao Paulo, aux courants syndicaux de classe et aux coordinations des mouvements sociaux (Argentine, Colombie, Chili, Paraguay, Puerto Rico, Mexique, Uruguay).
Cette perspective de regroupement des forces radicales et anticapitalistes exige qu’on situe notre expérience accumulée dans une dimension de pluralisme révolutionnaire qui transcende nos propres frontières organisationnelles. Une perspective qui s’inscrit dans une période d’accélération des affrontements politiques et sociaux. Tout comme la crise et les recompositions autocritiques de courants révolutionnaires, y compris certaines en provenance des divers " trotskysmes ". De là, la nécessité de créer des réseaux et ententes qui permettent la socialisation des différentes expériences et options politiques et stratégiques. De là, la nécessité d’ouvrir nos " instances " et de sortir des microclimats " d’auto-affirmation " paralysante.
C’est vrai que nous réalisons " nos tâches " dans un contexte rempli de difficultés comme pour aborder à temps et systématiquement les problèmes nouveaux d’analyse, d’options tactiques, de redéfinition programmatiques et d’approximations stratégiques. Et dans une situation où notre visibilité institutionnelle (à l’exception du Brésil) est très faible.
Ainsi, les organisations de la IVe Internationale se construisent dans des situations où les tensions font partie du paysage, et par des processus où se combinent des noyaux de militants avec expérience et continuité, des militants qui proviennent d’autres traditions de lutte, et avec l’incorporation de jeunes radicaux qui dynamisent la réflexion et l’action. Syntoniser ou administrer cette diversité engendre des conflits et confusions sur les options politiques à prendre. Cela n’empêche pas nos forces sur le continent latino-américain de continuer à être impliquées dans les luttes et les mouvements sociaux, comme dans les combats anti-impérialistes et anti-capitalistes.
Montevideo, 23 mai 2002
(tiré su site d’Inprecor )