Après avoir proposé sa candidature à la candidature et l’avoir retirée, ayant constaté qu’elle était loin de faire l’unanimité du mouvement, José Bové se pose de nouveau en candidat de recours, au nom de l’unité. Mais s’agit-il, pour autant, d’une candidature unitaire ?
Non, parce que, comme l’indique la motion issue de la réunion de Montreuil, il faudrait retirer les candidatures d’Olivier Besancenot et de Marie-George Buffet pour que... Bové devienne ce candidat unitaire. De plus, la réunion de des 20 et 21 janvier n’était représentative que d’une partie du mouvement, qui n’a par ailleurs jamais discuté démocratiquement de cette candidature. À moins de considérer qu’il suffit d’aligner des noms sur Internet pour choisir programme et candidat, ce qui aurait d’ailleurs rendu plus légitime la candidature de Nicolas Hulot - adoubé par un demi-million d’internautes - que celle de José Bové ! Force est, en outre, de constater que les principaux courants politiques du « non » de gauche (PRS, PCF, LCR, sans parler des républicains de gauche...) sont divisés et soutiennent des candidats différents. On aura beau le nier, crier au scandale des « manœuvres d’appareil », les faits sont têtus et démontrent que cette diversité renvoie à des divergences de stratégie politique.
Les clarifications politiques nécessaires à ce que la LCR s’engage avec d’autres dans une candidature unitaire, à savoir une attitude d’indépendance claire avec la direction du PS, n’ont pas pu se faire pendant des mois. C’est pour cela que nous avons engagé, depuis plusieurs semaines, la campagne Besancenot. Si les clarifications que nous demandions avaient été faites en temps utile, nous aurions pu aboutir. Du coup, la candidature de Marie-George Buffet ira au bout.
Et, nous le répétons, celle d’Olivier Besancenot aussi. José Bové, militant écologiste radical, n’est, dès lors, qu’un candidat de plus, celui d’un des courants politiques du « non » de gauche. Malgré les tentatives de Buffet d’abord et de Bové maintenant, de marquer leur candidature du sceau des collectifs du « non » de gauche, aucun des trois candidats issus du mouvement du 29 Mai n’aura la légitimité pour incarner seul cette filiation. Ce serait une usurpation et l’on ne construit rien de durable ce faisant. Pas plus que nous n’avions proposé Olivier Besancenot comme candidat du rassemblement, nous n’en ferons pas un candidat estampillé « 29 Mai, canal historique ». Ce n’est pas dans nos intentions, même si ce ne serait pas moins légitime que pour les autres candidatures car, comme le fait remarquer Jérôme Sainte-Marie dans Libération du 22 janvier : « 22% des Français jugent [Olivier Besancenot] comme le mieux placé pour défendre les idées antilibérales, loin devant José Bové à 12%. »
Quel projet ?
Ces soubresauts et ces retournements sont, bien entendu, le produit d’une accélération de la redéfinition du paysage politique, nourrie par la crise du PCF et la volonté de milliers de militants, jusque-là inorganisés, de s’engager sur le terrain électoral. Mais toutes les forces qui interagissent dans cette recomposition ne vont pas dans le même sens, et pas toutes dans le bon sens. La direction du PCF veut rassembler toute la gauche, PS compris, sur une base antilibérale. D’autres cherchent à unifier toutes les forces à gauche du PS, mais en laissant ouverte les possibilités d’alliance avec celui-ci au gouvernement et dans les exécutifs des grandes villes et régions. D’autres veulent que s’exprime une nébuleuse mouvementiste et écolo-radicale, d’autres encore une convergence républicaine de gauche et keynésienne. Il existe aussi un courant plus radical qui aspire à construire une nouvelle force politique anticapitaliste. C’est celui-là que nous voulons rassembler et qui peut trouver comme porte-voix, à cette présidentielle, notre camarade Olivier Besancenot. Nous ne ferons pas machine arrière, car le profil et la candidature d’Olivier Besancenot présentent une spécificité par rapport à toutes les autres : elle incarne avec plus de netteté le renouvellement, l’indépendance vis-à-vis du PS, l’alternative anticapitaliste, les aspirations des salariés, des jeunes, des chômeurs et tout le spectre de leurs luttes, du CPE à la grève de 2003, y compris en passant par l’altermondialisme. Olivier Besancenot a un profil politique que personne d’autre n’a : c’est un jeune, un travailleur salarié, qui incarne le mieux leurs aspirations et leurs luttes. Ainsi, Olivier Besancenot, avec la LCR, continue évidemment sa campagne pour défendre, face à Sarkozy et à l’extrême droite, un projet anticapitaliste, un projet alternatif aux alliances institutionnelles autour du PS, sans lequel les espoirs issus du 29 Mai ne trouveront pas de réalisation.
Rouge, hebdo de la LCR, du 24 janvier.