Cette hausse annoncée dans le budget du gouvernement Charest élèvera la facture étudiante de 325 $ par années pendant 5 ans à partir de 2012. Cette augmentation portera les frais de scolarité à un montant de 3793 $, alors qu’ils sont aujourd’hui à 2168 $.
L’accessibilité menacée
On nous dit souvent que la hausse des frais de scolarité n’aura pas d’impact sur la fréquentation des universités ou sur l’accessibilité universelle. Bizarrement, dans toutes les sphères économiques, lorsque les prix augmentent, la demande diminue. Alors pourquoi l’éducation serait-elle une exception ? En fait, on peut voir que c’est tout le contraire. On remarque, par les expériences passées et celles de différents pays, qu’une hausse des frais de scolarité est synonyme d’une diminution de l’accessibilité. Selon une étude du ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport (MELS), si les frais de scolarité avaient été élevés jusqu’à la moyenne canadienne, la fréquentation universitaire aurait diminuée de 21 %. Des chercheurs de la Nouvelle-Écosse ont conclu qu’à chaque augmentation de 1000 $ des frais de scolarité, la proportion des étudiants moins bien nantis est réduite de 19 %. On voit donc qu’une hausse des frais de scolarité restreint la mobilité sociale et diminue le nombre d’individus des classes sociales plus pauvres qui atteignent une scolarité plus élevée. [1] [2]
Certains estiment qu’avec l’augmentation du système de prêts et bourses, on compensera la hausse des frais de scolarité. C’est faux. Les bourses et les prêts sont donnés en fonction du salaire des parents, mais 50 % des élèves n’obtiennent pas d’aide parentale, malgré que le salaire de ceux-ci soit comptabilisé. Plusieurs se voient donc refuser l’aide financière, alors qu’ils sont dans le besoin. On peut compter que 80 % des élèves n’auront droit à aucune bourse en 2012. Les prêts et bourses, bien qu’ils soient essentiels, ne représentent donc pas une solution à la diminution de l’accessibilité qu’entraîne la hausse des frais de scolarité. [3]
Endettement étudiant
De ces 80 % des étudiants sans bourses, la plupart devront s’endetter ou travailler davantage. Selon une étude du ministère de l’Éducation, des Loisirs et du Sport, travailler plus de 15 heures par semaine nuit au parcours scolaire. Pour certains, vous le savez, il n’est tout simplement pas envisageable d’augmenter les heures de travail rémunéré considérant l’importante charge de travail universitaire. La solution sera donc d’emprunter auprès du gouvernement, et parfois même auprès de banques privées. On assistera alors à une augmentation de l’endettement moyen des étudiants qui est déjà de 15 000 $ à la sortie du baccalauréat au Québec. [4]
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Sous financement des universités
Un autre argument souvent avancé par ceux qui prônent la hausse des frais de scolarité est le sous-financement dont sont victimes nos universités. Ce n’est pas le sous-financement qui assaille principalement nos universités, mais plutôt le mal financement. En effet, les fonds sont parfois mal investis. Je pense notamment à l’échec de l’îlot voyageur ou bien aux recteurs qui s’administrent des bonus faramineux. De plus, on investit davantage l’argent dans la recherche lucrative pour les entreprises en délaissant la recherche fondamentale ou les services directement donnés aux étudiants tels que l’enseignement. [6]
De plus, le sous-financement des universités chiffré par la CRÉPUQ ne tient pas compte du besoin actuel de ressources, mais plutôt de la différence du financement au Québec par rapport à la moyenne canadienne. De tous les pays de l’OCDE, les États-Unis et la Corée du Sud sont les seuls à dépasser le Québec en ce qui a trait à la “dépense globale par étudiant”. Le sous-financement universitaire n’est donc pas si criant que ça. [7]
La hausse, inévitable ?
On veut nous faire croire que la hausse des frais de scolarité est incontournable, que nous sommes des enfants gâtés déjà bien chanceux d’avoir des frais de scolarité qui figurent sous la moyenne canadienne. On oublie cependant de nous dire que nos frais de scolarité sont supérieurs à la moyenne de l’OCDE ou que plusieurs pays d’Europe offrent une éducation près de la gratuité. De plus, il est faux de dire que cette hausse est inévitable. Nous pouvons financer l’État sans augmenter les frais et tarifier les services publics. Il y a d’autres méthodes pour trouver l’argent nécessaire, d’autres solutions qui ne réduisent pas le droit des moins nantis et qui sauvegardent l’accessibilité des services essentiels. On peut penser par exemple à une lutte plus efficace contre les évasions fiscales, à un contrôle plus rigoureux de la corruption, à la mise en place de plusieurs paliers d’impositions pour que les plus fortunés contribuent davantage, à une imposition sur le patrimoine, etc. Il faut cesser de croire qu’il n’existe pas d’alternatives.
Si j’ai réussi à vous faire comprendre en quoi cette hausse des frais de scolarité est illégitime et nuisible, j’espère maintenant vous convaincre de tout faire en votre pouvoir pour la contrer. Nous devons refuser cette hausse des frais de scolarité. Le mouvement étudiant doit faire front commun pour préserver le caractère égalitaire de nos universités. Il faut prendre part à la démocratie, la vraie, où le peuple est partie prenante de la politique, où il est la source des décisions, où sa voix est entendue, où il utilise sa voix pour crier haut et fort son droit, son droit à une éducation accessible, abordable et de qualité. Parce que faire notre juste part, c’est contribuer à la vie politique et mener les luttes sociales qui nous tiennent à cœur. Il faut se mobiliser en grand contre toutes les mesures régressives contenues dans le budget libéral. C’est toute la société qui subit les conséquences de ces mesures régressives : il faut donc tous ensemble résister !