Le 19 mars 2003, les militants antiguerre états-uniens sont descendus en masse dans la rue pour protester contre les bombardements en Irak qui venaient de commencer. Le lendemain, à New York, une manifestation de plusieurs milliers de personnes a arrêté la circulation dans le quartier de Times Square, sous une pluie battante. A San Francisco, la confrontation directe entre de jeunes militants et la police a entraîné le blocage de la ville et des centaines de personnes ont été arrêtées. Des actions de protestation ont été organisées dans des dizaines de villes à travers le pays.
La riposte la plus importante a été la manifestation du 22 mars à New York, à l’appel d’Unis pour la paix et la justice (UFPJ), le groupe qui avait coordonné les actions dans tous le pays le 15 février, y compris le rassemblement d’un demi-million de personnes à New York - la manifestation du 22 mars avait été prévue avant le début de la guerre, pour protester contre le refus de la municipalité d’autoriser une marche le 15 février ; le maire et la police avaient seulement autorisé un rassemblement ; la pression de l’opinion publique les a obligés à autoriser la manifestation du 22. Comme la marche avait été organisée en peu de temps, les organisateurs s’attendaient à une participation relativement modeste. Cependant, avec le début des bombardements, le soutien prit une énorme ampleur. Le jour de la manifestation, environ trois cent mille personnes étaient dans la rue.
La poursuite du mouvement est tout aussi remarquable que sa montée en puissance depuis le discours du président Bush à l’ONU, qui promettait la guerre. Beaucoup de militants craignaient que le début de la guerre marque un repli des forces modérées. D’autres, pensait-on, pourraient être démoralisés par l’incapacité à empêcher la guerre malgré l’ampleur sans précédent des manifestations antiguerre. Et même si un effet de ralliement au drapeau et de "soutien à nos troupes" a apparemment touché une partie de l’opinion publique aux Etats-Unis - si l’on en croit les sondages récents -, il n’a pas eu d’impact significatif sur les militants qui ont participé aux dernières manifestations.
Pendant ce temps, le président Bush allait réclamer au Congrès un "premier acompte" de 75 milliards de dollars pour financer la guerre. Somme qui vient s’ajouter à l’énorme déficit fédéral déjà prévu, dû à l’état de l’économie et à la baisse de rentrées d’impôts, conséquence des cadeaux fiscaux faits par Bush aux couches les plus aisées de la population étatsunienne. Les manifestants antiguerre refusent que tant d’argent soit gaspillé au nom de la conquête impériale et des tueries alors que les écoles, les services sociaux et les hôpitaux manquent cruellement de moyens. "De l’argent pour les services sociaux, pas pour la guerre !" est un des mots d’ordre les plus fréquemment repris dans les manifestations.
D’autres revendications associent la lutte contre "la guerre intérieure" à la lutte contre la guerre en Irak, en particulier l’opposition aux attaques contre les libertés démocratiques au nom de la "sécurité nationale" et le filtrage au faciès des voyageurs et immigrants venant de pays musulmans.
La prochaine grande manifestation aura lieu le 12 avril à Washington.
De New York, Steve Bloom, traduit par Mireille Court.
Rouge 2011 03/04/2003