Sans surprise, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a remis un nouveau rapport accablant pour l’Iran. Le régime de Téhéran a décidé de poursuivre son programme d’enrichissement d’uranium. L’admi nistration Bush appelle à une aggravation des sanctions, mais elle ne compte pas en rester là et elle intensifie les préparatifs militaires. Depuis plusieurs semaines, on assiste à un important déploiement des forces navales américaines dans le Golfe. Trois groupes navals sont sur place, depuis que le groupe d’attaque Stennis et le porte-avions Nimitz ont rejoint le porte-avions Eisenhower. Selon la BBC, les États-Unis seraient maintenant décidés à bombarder les sites nucléaires iraniens et les bases militaires. Cette information n’a pas été démentie par la Maison-Blanche, le vice-président américain, Dick Cheney, ayant déclaré, une fois de plus, que « toutes les options restaient sur la table ».
Cette démonstration de force s’accompagne d’une pression croissante contre les agissements du régime des mollahs en Irak. La mollahrchie entretient depuis longtemps des rapports ténus avec des milices et des partis chiites irakiens, y compris avec ceux qui collaborent à l’occupation américaine et qui siègent au sein du gouvernement de Bagdad. Ce qu’il y a de nouveau, c’est que l’administration Bush, relayée par son allié britannique et par les médias, a lancé une campagne de propagande accusant Téhéran de soutenir et d’armer l’insurrection en Irak, voire d’y participer directement.
Bush et son entourage veulent lever rapidement les obstacles que sont, pour eux, le programme nucléaire iranien et l’influence de la République islamique en Irak et au Liban. La guerre menée par Israël contre le peuple libanais et contre le Hezbollah s’inscrivait dans une confrontation plus vaste opposant les États-Unis à la République islamique d’Iran. Son issue désastreuse a renforcé l’idée qu’une intervention militaire contre l’Iran devenait inéluctable. Cela dit, cette appréciation ne prend pas en compte le bourbier dans lequel se trouvent les forces américaines en Irak, ni le retrait prématuré de plusieurs milliers de militaires britanniques d’Irak, dont une grande partie étaient stationnés dans le sud du pays, à proximité immédiate de l’Iran.
Dans ce contexte, les alliés européens de Washington pourraient réfléchir à deux fois avant de s’engager dans une nouvelle aventure guerrière. C’est sur cette fragilité et sur le soutien de la Russie et de la Chine que compte le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, pour éviter l’affrontement militaire avec les États-Unis. Cette prise de risque divise le régime de Téhéran. Réalisme politique aidant, le fil des négociations n’est pas encore totalement rompu et chacun fait monter les enchères. Il n’est donc pas à exclure que la crise actuelle puisse, malgré tout, se dénouer par un compromis sur le dos des peuples de la région. Il pourrait prendre la forme d’un lâchage par Téhéran du Hezbollah libanais et des milices chiites en Irak, facilitant ainsi la position américaine, en contrepartie d’un laisser-faire sur le nucléaire civil et d’une levée des sanctions économiques contre l’Iran. Cette hypothèse est fortement contestée par le gouvernement israélien, qui pousse Bush à engager une opération militaire contre l’Iran.
L’affrontement militaire peut se transformer en désastre pour les peuples du Moyen-Orient car, comme le montre le sort tragique du peuple irakien, il ne fera qu’aggraver la situation. Pour se libérer du joug obscurantiste et dictatorial de la République islamique, le peuple iranien n’a rien à attendre des grandes puissances. Il est donc urgent de reconstruire un vaste front antiguerre international contre toutes les occupations et contre la politique impérialiste de Washington, de ses alliés européens et d’Israël.
KIA Babak
* Paru dans Rouge 2195 du 1er mars 2007.