Tiré de Brasil do Foto
traduit par le site à l’encontre
http://www.alencontre.org/Venezuela/Vene.Amaral04_09.html
Les expropriations et les occupations de secteurs stratégiques du pays effectuées au cours des dernières semaines par le président du Venezuela, Hugo Chávez, ont provoqué un malaise au sein de secteurs de la bourgeoisie vénézuélienne et de membres de l’opposition. Ceux-ci l’accusent d’exercer une politique d’oppression et de centralisation du pouvoir dans la personne du président. Hugo Chávez défend le point de vue selon lequel il ne s’agit, dans la politique adoptée au Venezuela, que d’une « radicalisation du processus révolutionnaire » et que les changements qui sont en train de se produire conduiront à une « recherche plus intense des racines révolutionnaires et bolivariennes de ce processus ». [La transnationale helvétique du ciment, Holcim — contrôlée par Thomas Schmidheiny et ayant son siège à Jona (St-Gall) — a porté plainte, fin mars 2009, contre le gouvernement Chavez devant le Centre international pour les règlements de l’investissement. En effet, la nationalisation, en 2008, de sa filiale vénézuélienne — dans le cadre de la nationalisation de la branche du ciment — n’aurait pas donné lieu aux versements prévus par l’accord de 1993 sur la « protection des investissements » signé entre la Suisse et le Venezuela.]
Selon le point de vue de l’économiste et éducatrice populaire Roberta Traspadini, les mesures adoptées par Chávez et la façon dont celui-ci a mené la politique gouvernementale peuvent être incluses dans le contexte de résistance menée par lui-même et par d’autres présidents contre l’impérialisme en Amérique Latine. Il faut, dit-elle, « considérer toute cette politique mise en place par Hugo Chávez, par Evo Morales et par Correa, comme une politique qui tente, dans une certaine mesure, d’inverser la situation de domination impérialiste vécue dans le continent ».
Pour Roberta Traspadini, ce que Chávez a fait, c’est de « mettre peu à peu en place une politique internationale de reprise de la force de l’État sur le capital ». L’économiste explique que la capacité qu’a eue le capital – national et transnational – de promouvoir une politique de promotion de ses intérêts en Amérique Latine, commence à être mise en difficulté par des mesures du genre de celles que Hugo Chávez a prises. « Ce qui semblait être devenu hégémonique et omnipotent dans le continent vient à être mis en question par une politique plus nationaliste et moins néolibérale », résume-t-elle.
Les interventions
Le 28 février 2009, Chávez a entrepris une série d’expropriations de terres de grandes propriétés, laissées en friche selon lui, et a occupé des entreprises productrices de riz accusées de stocker celui-ci afin d’en faire grimper le prix sur le marché et de contourner ainsi le système de réglementation du prix des produits de base par le gouvernement. Dans le cadre des interventions menées par le gouvernement, des militaires de la Garde Nationale ont occupé la fabrique de riz Primor à Calabozo. Celle-ci appartient à l’entreprise Polar, elle-même la plus grande productrice d’aliments du Venezuela. Une unité de production de riz de la compagnie nord-américaine Cargill a également été expropriée.
De plus, le15 mars 2009, Chávez a décidé l’occupation par la Force Armée Nationale Bolivarienne (FANB) des ports et aéroports dans les États gouvernés par l’opposition. Selon lui, la décision a été prise pour combattre les mafias et le narcotrafic dans ces endroits qui constituent des points stratégiques pour la sécurité du pays. L’ordre a commencé à être exécuté le 21 mars dernier, lorsque des militaires ont occupé l’aéroport et le port de Maracaibo, capitale de l’État de Zulia (au nord du pays) administrée par l’opposant Manuel Rosales, la ville de Porto Cabello, dans l’État de Carabobo (au centre du pays), administrée par le gouverneur de l’opposition Enrique Salas Feo, et l’aéroport de la capitale de l’État, Valência.
Selon Marcelo Buzzeto, professeur de géopolitique à l’Université de São Paulo (USP) et membre du secteur des relations internationales du MST, de telles actions n’ont pas été prises individuellement par le président Chávez. Elles font partie d’un projet de développement national conçu en 2007 et concrétisé dans le Plan Socialiste de Développement de la Nation, approuvé par l’Assemblée Nationale du pays. « Je pense que les mesures prises sont une réaction des forces démocratiques populaires et de la gauche qui soutiennent Chávez », affirme-t-il.
En 2007 déjà, Chávez avait entrepris une série d’étatisations de secteurs considérés comme stratégiques, comme la nationalisation de compagnies de télécommunications et d’électricité, de la zone pétrolifère du fleuve Orénoque, de la plus grande industrie sidérurgique du pays et de trois entreprises de ciment.
Un processus révolutionnaire
Pour Marcelo Buzzeto, le thermomètre permettant de mesurer la « r adicalisation du processus révolutionnaire », tel que défendu par le président vénézuélien, sera « la rapidité, l’intensité et la quantité d’expropriations qui seront réalisées dans le futur ». Cela en raison du fait qu’il n’existe selon lui pas de socialisme au Venezuela. « Le pays continue à être capitaliste. Celui qui détient le pouvoir au Venezuela ce n’est pas Chávez, mais ceux qui contrôlent les moyens de production », insiste-t-il.
L’analyse du processus vénézuélien par Osvaldo Coggiola, professeur titulaire d’histoire contemporaine à l’Université de São Paulo (USP), n’est en revanche pas la même. Au contraire de ce que pense Marcela Buzzeto, Coggiola croit que la politique au Venezuela est fondamentalement basée sur la personne de Chávez et que pour qu’il existe de fait un processus révolutionnaire, celui-ci devrait être pris en charge par le peuple et non par la personne du président. « Ce n’est pas ce qui est en train de se produire actuellement : la population vénézuélienne ne mène pas ses propres batailles, mais mène les batailles de Chávez contre l’opposition », allègue-t-il.
L’historien pense que pour que les travailleurs aient le contrôle des moyens de production, il est nécessaire que se produise une modification de la nature de l’État qui « cesserait d’être totalement subordonné à la direction politique de Chávez pour devenir un État où les travailleurs organisés eux-mêmes feraient effectivement partie du pouvoir politique ».
Les effets de la crise
Pour Coggiola, les mesures que Chávez est en train de mettre en place depuis quelques semaines, particulièrement l’occupation des ports et des aéroports, servent à désarticuler l’opposition et sont directement en relation avec les effets de la crise économique mondiale sur l’économie vénézuélienne, à travers la chute du prix du pétrole. Le pétrole est responsable de la moitié des recettes du pays. Le budget, qui prévoyait pour cette année un baril à 60 dollars, a dû être revu à la baisse ; et aujourd’hui des projections d’un baril à 40-45 dollars sont crédibles étant donné la récession internationale.
En raison de cela, le gouvernement vénézuélien a présenté le 21 mars dernier un paquet de mesures contre la crise. Parmi ces mesures, il y a la coupe de 6,7 % dans le budget et l’augmentation de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (IVA) de 9 % à 12 %. En contrepartie, Chávez a annoncé l’augmentation de 20 % du salaire minimum, afin de soutenir la demande interne et il a garanti que ces mesures n’affecteront ni l’emploi ni les investissements sociaux.