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L’Europe écosocialiste sera féministe ou ne sera pas !

mercredi 22 avril 2009, par Barby


Par Barby le jeudi, 09 avril 2009
tiré du site de la LCR belge


La majorité sociale, celle qui ne doit sa tartine qu’à son travail et ses luttes, est elle-même majoritairement féminine. Les femmes ont conquis par leurs luttes une égalité formelle dans plusieurs pays. Mais, contrairement à ce que prônent les tenant/es de « l’égalité déjà là », le patriarcat, ce système d’oppression des femmes qui traverse toutes les cultures et qui se concrétise dans tous les domaines de la vie, reste une réalité. Partout dans le monde, les femmes sont les plus précaires des précaires, les premières à subir les dégâts du capitalisme. Partout dans le monde et tous les jours, elles sont humiliées, mutilées, violées, achetées, vendues, cloîtrées ou tuées par la violence patriarcale sous toutes ses formes. Mais partout dans le monde, trop souvent dans l’ombre, les femmes sont aussi nombreuses à résister et à se révolter au quotidien.

Parce que nous sommes féministes, nous sommes anticapitalistes ; parce que nous sommes anticapitalistes, nous sommes féministes ! Nous encourageons et soutenons les résistances des femmes contre leur oppression, leurs luttes pour leur émancipation et la constitution d’un mouvement des femmes, autonome, large, unitaire, antiraciste et internationaliste. Le féminisme n’est pas pour nous un supplément d’âme, un chapitre qu’on glisse vite fait à la fin d’un programme. Il traverse de fond en comble nos luttes, nos rêves et nos projets parce qu’il alimente le combat de touTEs les oppriméEs pour la justice sociale et la dignité jusqu’au plus intime de nos vies.

Nos revendications féministes se déclinent tout au long du programme anticapitaliste que nous défendons. Nous les rassemblons ici autour de dix axes, qui ne correspondent pas à un ordre de priorités.

1.Des services publics gratuits partout et du temps pour vivre !

2.Un temps plein avec un vrai salaire et un vrai statut !

3.Une sécurité sociale renforcée et basée sur l’individualisation des droits !

4.Autonomie, dignité et égalité des droits pour touTEs !

5.Stop aux violences hétéro-sexistes !

6.Nos corps ne sont pas à vendre !

7.Pour une vie sexuelle et affective émancipée !

8.Leurs rosaires hors de nos ovaires !

9.Une Europe construite par, pour et à l’image des peuples !

10.Pour l’émancipation : un mouvement des femmes autonome, large, unitaire, antiraciste et internationaliste !

Les femmes ne paieront pas leur crise !

L’Union Européenne (UE) n’a pas attendu la crise pour prôner une politique d’austérité qui s’attaque immanquablement aux salaires, au droit du travail, aux mécanismes d’assurances sociales collectives, aux services publics et aux droits fondamentaux. Dans ce contexte, rien d’étonnant à ce que le « retour des femmes au foyer » et le repli sur la « solidarité familiale » et les « vraies valeurs » hétéro-sexistes, défendus comme « alternatives faciles » par les réactionnaires de tous poils, reviennent à la mode.

Aujourd’hui, la crise capitaliste amplifie ce carnage en s’abattant sur ceux, et surtout sur celles, qui n’y sont pour rien. Tandis que les gouvernements assurent une prise en charge publique des échecs des vrais responsables à travers des « plans de relance » et le renflouement de banques privées tout en augmentant la dette publique, les femmes sont en première ligne des conséquences du casino géant. Les premières à compenser tant bien que mal la réduction des dépenses et services publics (1). Les premières licenciées de leurs emplois précaires (2). Les premières à perdre leurs droits aux allocations sociales (3). Les premières à faire face au pillage et à l’exploitation du Sud et à la négation de leurs droits fondamentaux au Nord (4). Les premières à subir les violences, encore plus exacerbées par les guerres viriles des hommes (5). Les premières à être transformées en marchandise sexuelle (6). Les premières à sacrifier leurs sentiments et leurs désirs (7). Les premières attaquées par les injonctions rétrogrades des intégrismes religieux (8). Les premières méprisées par les institutions bourgeoises (9). Mais aussi les premières à miser sur la solidarité (10).

Alors que nous sommes encore loin d’une réelle émancipation des femmes, de lourdes menaces pèsent sur leur autonomie matérielle et personnelle pour laquelle les féministes des générations précédentes se sont tant battues. Aujourd’hui, nous poursuivons ce combat bec et ongle ; nous rêvons d’égalité et comptons bien voir nos rêves se réaliser !

1) Des services publics gratuits partout et du temps pour vivre !

L’insuffisance et la diminution des services publics et le coût des services privés qui prennent leur place précarise et isole toujours plus les travailleurs/euses et les personnes âgées, particulièrement dans les quartiers populaires. Beaucoup n’ont d’autre choix que de s’en remettre au système D… ou à la solidarité familiale quand c’est possible. En prônant le démantèlement des services publics, la privatisation de la protection sociale et la concurrence sans frein, l’UE transfère de facto les responsabilités des Etats et des collectivités vers l’espace domestique et donc vers les femmes selon l’idée tenace que leur revient l’économie non-monétaire, « qui ne rapporte pas », comme les tâches domestiques et les soins aux enfants et personnes dépendantes.

Pour les femmes, la division sexuelle du travail constitue une entrave importante à leur autonomie financière et personnelle. Chaque jour, elles consacrent en moyenne une heure pour les soins des enfants, (contre 22 minutes pour les hommes) et 3h38 pour les travaux domestiques (contre 1h56 pour les hommes). Cela implique une utilisation quasiment exclusive de leur temps et de leurs ressources à ces tâches, laissant de côté leur temps de vie privée comme toute possibilité temporelle et financière de se faire une place dans le monde du travail tel qu’il est en suivant des formations, en recherchant de contacts, en étant disponible pour faire progresser leur carrière, … En effet, avec enfant(s) à charge, les femmes sont 65,5% à travailler contre 91,7% des hommes dans la même situation. Et, lorsqu’elles travaillent malgré tout, elles sont au four et au moulin constamment, accomplissant ainsi une double journée de travail.

Les politiques de l’UE sont loin d’encourager une meilleure répartition des tâches entre hommes et femmes. Les beaux discours sur la nécessaire conciliation entre la vie privée et professionnelle cachent d’ailleurs mal un recul de fait quant à la place assignée aux femmes au sein de la société. Par exemple, alors que l’UE se limite à une énumération d’objectifs –jamais atteints- pour le développement de structures d’accueil des enfants, les mesures concrètes actuellement à l’étude en matière de « conciliation » sont uniquement axées sur les congés familiaux, favorisant notamment « l’attractivité » d’un congé de maternité rallongé. Cette Europe préfère ainsi favoriser le mode de garde individuel et non rémunéré à charge des mères plutôt que d’imposer la mise en place dans chaque Etat d’un système public regroupant tous les modes de garde pour le soin des enfants, ce qui concerne pourtant l’avenir de la société toute entière.

Pour favoriser le partage des tâches entre hommes et femmes, il est nécessaire, d’une part, de laisser plus de place pour touTEs au temps libéré du travail (rémunéré ou non) et, d’autre part, de favoriser une évolution des mentalités. Dans ces objectifs l’Europe que nous voulons inversera la vapeur sur tout son territoire avec :

 la collectivisation généralisée de l’économie non-monétaire par le développement de nouveaux services publics, particulièrement pour l’accueil des enfants (en offrant divers modes de garde pour les enfants non encore scolarisés comme pour les plus grands en dehors des heures d’école et ce 24h sur 24), les soins aux personnes dépendantes (malades, handicapé/es, personnes âgées, …), les travaux domestiques (restaurants, lavoirs, nettoyage, …), la lutte anti-violences, ....

 la réquisition des services privatisés ces dernières années dans les domaines de la santé, des soins aux personnes, de la santé sexuelle et reproductive ; de l’environnement, des transports, de l’énergie et du logement ; du développement social et économique ; de la culture, de la formation et de l’enseignement, y compris en renforçant, en personnel et en moyens, les écoles maternelles pour garantir un accueil et un éveil des enfants dans une structure éducative dès 2 ans et demi ; …

 l’extension, le renforcement et l’amélioration de tous les services publics de proximité, offrant de nouveaux emplois mixtes, de qualité, formateurs et bien rémunérés. Tous ces services doivent assurer une accessibilité horaire et une implantation sur l’ensemble du territoire en fonction des besoins des habitant/es. Ils doivent tendre vers la gratuité tout en assurant la qualité. Ils doivent permettre la mise en œuvre cohérente des politiques publiques élaborées démocratiquement, par la population et les travailleurs/euses concerné/es et dans le respect de la diversité sociale pour assurer la satisfaction des besoins sociaux et écologiques dans une perspective réellement émancipatrice pour touTEs. Il s’agit donc que des institutions élues issues des mouvements de femmes disposent d’un droit de regard et de veto sur toutes les décisions qui les concernent.

 la réduction collective du temps de travail (RTT) généralisée vers les 32 heures par semaine partout, sans flexibilité ni augmentation de cadences ni perte de salaire, et avec embauche compensatoire.

 l’aménagement de pauses-carrières, à répartir au choix par les travailleurs/euses au moment de leur vie qui leur convient le mieux, avec le maintien intégral du salaire, de l’ancienneté et des droits sociaux et avec la garantie de récupérer sa fonction dès le retour au travail. Il est nécessaire que ces pauses-carrière soient obligatoires et d’une durée identique pour toutes et tous afin d’éviter qu’elles ne deviennent un piège pour les femmes en les encourageant à interrompre leur carrière pour les soins des enfants et des proches par exemple.

 l’harmonisation des congés parentaux sur tout le territoire européen. Ils doivent assurer le droit à un congé prénatal obligatoire et incompressible pour les mères, avec la possibilité pour les pères d’accéder au même congé dans les mêmes conditions ; le droit à un congé obligatoire après l’accouchement, incompressible et de même durée pour les deux parents ; le droit à un congé parental à prendre obligatoirement en alternance par les deux parents. Tous les congés parentaux doivent avoir les mêmes garanties que les pauses-carrières. Plutôt que d’allonger la durée du congé lmaternité, les services publics de garde doivent être activement développés.

 La diffusion de larges campagnes de sensibilisations contre les stéréotypes et comportements hétéro-sexistes qui entretiennent les rôles sociaux « féminins » et « masculins » dans le cadre des politiques publiques (enseignement, santé, culture, …) décidées démocratiquement et d’un syndicalisme féministe de combat, à travers les médias de masse, les entreprises, … ; suppression de tous les stéréotypes hétéro-sexistes dans les livres et programmes scolaires ; interdiction des publicités hétéro-sexistes.

Ces mesures d’élargissement du temps libre et de sensibilisation contre les stéréotypes hétéro-sexistes permettraient, en plus de résorber le chômage par une répartition du travail, la pleine satisfaction pour chacunE de sa vie privée, sociale, politique, familiale, culturelle, affective, ... et la mise en pratique une démocratie réellement autogérée par touTEs.

2) Un temps plein avec un vrai salaire et un vrai statut !

Avec les jeunes et les travailleurs d’origine étrangère, les femmes sont principalement concernées par les emplois précaires encouragés par les politiques de l’UE, particulièrement la « stratégie de Lisbonne ». Les emplois à temps partiel sont exercés aux trois quart (76,5%) par des femmes qui sont elles-mêmes 30,7% à travailler à temps partiel, contre 6,9% des hommes. L’hyperflexibilité, avec horaires coupés et changeants ainsi que les emplois sous-qualifiés et les sous-statuts sont caractéristiques de l’emploi féminin.

Les emplois précaires et le temps partiel expliquent en grande partie l’écart salarial entre hommes et femmes. Pour chaque heure prestée, ces dernières gagnent en moyenne 25% de moins que les hommes dans l’UE. L’écart salarial est encore creusé par d’autres facteurs : la non mixité des emplois et des fonctions dans les faits ; les promotions individuelles et avantages extra-salariaux que les hommes négocient plus facilement que les femmes grâce aux codes comportementaux qu’ils ont appris au cours de leur éducation ; l’accès inégal aux formations qualifiantes qui sont souvent données en soirée ou dans des endroits difficilement accessibles sans voiture ; ou encore la valorisation de l’expérience et de la carrière professionnelles qui sont souvent moindres pour les femmes.

Pour l’amélioration du niveau de vie et l’effectivité de l’égalité salariale, l’Europe que nous voulons garantira partout :

 L’interdiction des contrats précaires et leur conversion en emplois statutaires ou en CDI à temps plein.

 L’augmentation significative des salaires et leur indexation automatique

 Un salaire minimum interprofessionnel obligatoire, progressivement aligné sur le salaire minimum le plus élevé d’Europe

 Le calcul du salaire brut basé sur la fonction, et non sur la compétence

 L’interdiction des négociations individuelles de contrat

 La mixité de toutes les fonctions dans tous les secteurs

 L’accessibilité de tous les emplois aux personnes peu ou pas qualifiées, avec une garantie de formation au cours de la carrière

Ces mesures sont parfaitement réalisables, à condition de chercher l’argent là où il est et d’imposer une juste répartition des richesses au niveau européen. Les entreprises qui ne respectent pas ces mesures concrètes de lutte contre l’écart salariales doivent être sanctionnées financièrement et contribuer à un fonds de compensation destiné à augmenter davantage les pensions des travailleurs/euses à temps partiel ou qui ont interrompu leur carrière. Pour l’effectivité de ces mesures, l’exercice de la démocratie autogérée est nécessaire jusqu’au cœur des entreprises, à travers le contrôle ouvrier sur les embauches, les promotions, les formations, les conditions de travail et un syndicalisme féministe de combat.

3) Une sécurité sociale renforcée et basée sur l’individualisation des droits !

L’UE pousse à transformer les mécanismes de solidarité et de protection sociale en une protection dite « universelle », c’est-à-dire minimale et résiduelle. Les diminutions des cotisations patronales et la nouvelle niche de marché pour les assurances privées que représente ce secteur apporte en effet un double gain pour les capitalistes. Or, si la sécurité sociale a comme but final la protection des personnes, les assurances privées visent avant tout le protection de leurs profits, la précarisation des travailleurs/euses n’étant pour elles qu’un dégât collatéral.

Se réfugiant derrière les invectives européennes, « c’est pas nous, c’est Bruxelles », les gouvernements font pression pour complexifier et durcir les conditions d’accès aux droits aux allocations en stigmatisant les allocataires sociaux. Les politiques « d’activation » font injustement porter la responsabilité du chômage sur les chômeurs et chômeuses, alors même que, pour 40 chômeurs/euses en recherche d’emplois, il n’y a en moyenne qu’un emploi disponible. L’exigence de « disponibilité » des travailleurs/euses sur le marché de l’emploi est encore plus difficilement atteignable pour les femmes qui doivent majoritairement assumer seules les tâches familiales et domestiques. Il est donc d’autant plus facile de les « exclure » en les traitant de parasites. Même si leur taux d’activité reste toujours plus faible que celui des hommes (58,3% contre 72,5%) et leur taux de chômage toujours plus élevé (9,5% contre 6,7%), les femmes sont encore plus nombreuses parmi les « invisibles », qui n’apparaissent pas dans ces derniers chiffres parce qu’ils/elles ne correspondent pas aux « critères » conditionnant le droit aux allocations.

Sous prétexte du vieillissement de la population, l’UE s’attaque aussi aux systèmes de pensions basés sur la solidarité et repousse toujours plus l’âge de la retraite. Peu de femmes bénéficient d’une pension complète, puisqu’elles interrompent davantage leur carrière et sont majoritaires à travailler en temps partiel. Leur plus bas salaires ne leur permettent ni d’espérer une retraite décente par le système de répartition ni même de s’intégrer dans le pervers système par capitalisation.

Certains systèmes de sécurité sociale, comme en Belgique, basent les droits sur le titulaire du salaire et les déclinent en droits directs et droits dérivés (indirects). Les droits directs sont financés par des cotisations prélevées sur les rémunérations, et correspondent donc au revenu professionnel individuel du titulaire. Les droits dérivés sont accordés à la personne titulaire du salaire pour couvrir les membres de sa famille. Cela se traduit par des taux de ménages (une majoration du revenu de la personne qui a le conjoint à charge), des pensions de survie, ... L’existence de droits dérivés, comme le taux ménage, influence aussi le « choix » de certaines femmes qui acceptent des situations salariales bien trop basses parce qu’au-delà le ménage ne bénéficierait plus du quotient conjugal, avantage fiscal non-négligeable. Cela va sans dire qu’en cas de séparation, ces femmes se retrouvent sans quotient conjugal, avec une carrière incomplète et dans une situation extrêmement précaire.

Une série de mesures à harmoniser au niveau européen doivent garantir les systèmes de solidarité et de sécurité sociale dans l’Europe que nous voulons :

 L’interdiction des fonds de pension et l’assurance de financement de la protection sociale publique, notamment par une plus forte contribution des employeurs.

 La revalorisation des allocations avec une liaison automatique au bien être et l’individualisation des droits afin de garantir à touTEs les allocataires, indépendamment du statut familial, un minimum d’existence harmonisé vers le haut, vers une protection sociale maximale. Aucune allocation ne doit être limitée dans le temps ni soumise à des exigences d’employabilité.

 L’interdiction des licenciements collectifs et l’harmonisation vers le haut la couverture des services publics qui créent les emplois socialement et écologiquement utiles et nécessaires.

 L’âge de la prépension à 55 ans et celui de la pension à 60 ans maximum pour toutes et tous, avec une allocation de 75% du revenu sur les 5 meilleures années, l’embauche obligatoire d’un/e jeune et une juste reconnaissance des métiers pénibles des femmes.

4) Autonomie, dignité et égalité des droits pour touTEs !

Par ses politiques impérialistes, l’UE participe activement à l’exploitation des peuples du Sud et au pillage de leurs ressources. Mais elle se lave les mains de sa lourde part de responsabilité dans la mondialisation capitaliste. La misère et les famines qu’elle engendre sont particulièrement ressenties par les femmes qui tentent d’y pallier au mieux, entre autres à travers les initiatives d’économie informelle et solidaire qu’elles portent à bout de bas. Pour une véritable autonomie et indépendance des peuples du Sud, l’Europe doit au contraire intervenir activement pour inverser la marche du monde par :

 L’annulation de la dette des pays du Sud ;

 L’arrêt de tout soutien aux dictatures et le gel des avoirs des dictateurs avec leur rétrocession aux peuples ;

 L’arrêt de toutes les politiques néo-coloniales et impérialistes ; l’augmentation de l’aide financière au développement comme réparation des dégâts du colonialisme et au nom de la solidarité internationale et sa réorientation vers le soutien au développement des services publics et de coopératives populaires ; le démantèlement et l’abolition des institutions internationales au service du capital comme l’OMC le FMI ou la Banque Mondiale.

Des milliers de personnes dans le monde sont contraintes à l’exil. Parmi elles, les femmes sont nombreuses à migrer vers le Nord à la recherche d’une vie meilleure et, souvent, de ressources qui permettent à leurs proches de subsister. Mais la politique sécuritaire et répressive de l’Europe-forteresse condamne les migrantEs à la clandestinité, l’exploitation et la précarité. Les femmes migrantes sont doublement discriminées, en tant que femmes étrangères et en tant que migrantes en zone de non-droits. Clandestines, elles n’ont aucun recours en cas de violences sexistes. Leur dépendance conjugale et familiale est entretenue et même institutionnalisée puisque leur titre de séjour n’est pas renouvelé en cas de rupture de vie commune ou puisque c’est le statut personnel du pays d’origine qui s’applique. Dans ces conditions, les femmes migrantes sont des proies particulièrement faciles pour les proxénètes, les marchands de sommeil et les employeurs au noir qui les exploitent, parfois malgré leur haute qualification, pour des travaux dont les femmes en situation régulière ne veulent pas.

Pour la dignité et le respect des migrants, et particulièrement des migrantes, l’Europe que nous voulons imposera partout :

 le droit du sol partout, à travers la liberté de circulation et d’établissement ; la régularisation immédiate de toutes les personnes sans papiers ; l’application de la loi du pays de résidence en matière de statut personnel et de législation du travail et le droit de vote à tous les scrutins pour touTEs ; la citoyenneté de résidence qui implique le droit de vote pour touTEs à tous les scrutins.

 Le droit d’asile systématique aux victimes de violences hétéro-sexistes (proxénétisme, mutilations génitales, mariage forcé, répudiation, LGBTI-phobie, …)

 Le droit à l’exercice de sa langue et de sa culture pour chaque peuple. Des services d’interprétariat et de médiation culturelle doivent être mis en place dans les administrations publiques pour que celles-ci soient réellement accessibles à touTEs.

Les femmes (d’origines) non-européennes sont en première ligne des préjugés racistes qui, parfois même en instrumentalisant certaines revendications féministes légitimes, les stigmatisent et les discriminent encore plus. C’est ce qui se produit par exemple dans plusieurs Etats membres avec les débats autour du foulard islamique. Les premières concernées sont parfois d’emblée jugées soumises ou manipulées à ce point que d’autres se permettent de parler en leur nom, leur déniant ainsi leur droit à l’expression. Lorsque des entreprises, des écoles ou des administrations publiques interdisent le port du foulard, elles discriminent de fait les femmes qui doivent choisir entre leur droit à pratiquer la religion de leur choix comme elles l’entendent et leur droit à accéder à l’instruction ou à l’emploi. Contre le racisme, l’Europe que nous voulons doit garantir sur son territoire :

 l’exercice des droits fondamentaux pour touTEs, indépendamment des choix culturels et religieux qui restent de l’ordre des libertés personnelles

 Le droit à l’autodétermination, particulièrement des catégories sociales les plus stigmatisées comme les femmes (d’origines) étrangères

5) Stop aux violences hétéro-sexistes !

Le patriarcat génère de nombreuses formes de violences envers les femmes, des plus insidieuses et sournoises aux plus flagrantes et sauvages, à travers le monde entier. Elles ne sont pas propres à certaines cultures comme voudraient nous le faire croire ceux et celles qui brandissent leurs arguments racistes sous couvert d’un noble combat pour l’égalité entre hommes et femmes. Qu’il s’agisse de remarques déplacées -mais « pleines d’humour »- des collègues de travail, de mains aux fesses dans le tram, de mariages « arrangés », de viols, de coups ou de mutilations qui marquent les corps, les violences sexistes sous toutes leurs formes sont inacceptables.. Elles conditionnent la vie de toutes les femmes, contraintes à adopter au quotidien, consciemment ou pas, des attitudes psychologiques et des comportements qui puissent les protéger des violences masculines potentielles. Les violences patriarcales s’abattent aussi sur ceux et celles qui ne correspondent pas aux normes hétéros.

Le Conseil de l’Europe estime que 45% des femmes sont victimes de violences masculines au cours de leur vie, et une sur cinq d’agression sexuelle. D’autres statistiques sont encore plus alarmantes. Mais aucune ne peut prétendre être à la hauteur de réalités qui sont souvent invisibles et taboues. Pourtant, la lutte contre les violences patriarcales ne fait pas partie des priorités de l’UE. Les campagnes de désinformation du lobby masculiniste n’aident pas à une prise en charge sérieuse de ce problème de société par les pouvoirs publics. La culpabilisation -voire la criminalisation- des victimes qui « provoquent » ou qui « affabulent » montre bien à quel point le monde est fait à la mesure des hommes.

L’Europe que nous voulons harmonisera la lutte contre les violences hétéro-sexistes sur tout son territoire, avec :

 La reconnaissance et l’interdiction de toutes les formes de violences hétéro-sexistes

 La mise en place de politiques publiques anti-violences. Cela implique la possibilité d’engager des poursuites contre les Etats qui tolèrent de fait ces violences. Ces politiques doivent être élaborées par les premières concernées, à travers des instances élues par les mouvements de femmes et les mouvements LGBTI.

 Le soutien structurel, avec les moyens financiers et matériels nécessaires, des espaces d’expression, de protection, d’hébergement et d’auto-défense autogérés par les femmes pour qu’ils puissent s’étendre et se renforcer. Ces espaces sont les mieux à même de rendre confiance, estime et autonomie aux victimes de violences et de leur fournir un point d’appui pour reconstruire leur vie. En encourageant la parole libérée, ils pourront briser les tabous et stéréotypes qui entretiennent les amalgames racistes et la stigmatisation des victimes dans l’appréhension de la violence sexiste.

 L’élaboration, dans le cadre des politiques publiques anti-violences, de campagnes coordonnées de dénonciation et de prévention des comportements machistes et violents par les centres et associations anti-violences ; leur large diffusion à travers les médias, l’ensemble des politiques publiques, les entreprises et la formation de touTEs les intervenant/es sociaux/ales susceptibles de devoir réagir face à des situations de violences hétéro-sexistes.

 Les dictatures, les guerres et les occupations que l’Europe impérialiste soutient à travers le monde développent des zones de non-droits où les femmes sont assassinées en toute impunité et utilisées comme armes de guerre par les forces belligérantes. Les femmes ne sont pas par nature pacifiques et non-violentes ; souvent, elles intériorisent leur agressivité parce qu’elles ont grandit avec des préceptes éducatifs qui leur interdisent de l’exprimer par la violence ou la force, au contraire des garçons pour lesquels de tels comportements sont encouragés. L’Europe que nous voulons visera à développer d’autres types de relations que celles basées sur la force, le pouvoir, la violence. Dans ce sens, elle garantira sur tout son territoire :

 L’interdiction des industries d’armements et leur réquisition sans rachat ni indemnités pour les convertir en industries socialement et écologiquement utiles.

 L’arrêt de toute collaboration avec l’OTAN et le retrait de toutes ses troupes des zones occupées et déchirées par les guerres impérialistes et néocoloniales.

 Intervenir activement pour soutenir les résistances de tous les peuples occupés, garantir la protection des femmes dans les zones de conflit et punir comme crimes de guerre les violences qu’elles y subissent.

6) Nos corps ne sont pas à vendre !

La prostitution est souvent considérée comme « le plus vieux métier du monde ». A une époque, elle était plus ou moins tolérée comme « écolage » pour les jeunes hommes au début de leur vie sexuelle. Aujourd’hui, elle est invoquée comme défouloir légitime pour les hommes en manque de sexe puisque, selon la vision viriliste hégémonique, la sexualité masculine serait pulsionnelle et irrépressible. Pourtant, la prostitution, est bel et bien une forme extrême de violence envers les femmes, qui constituent l’écrasante majorité des prostituéEs. Elle est à ce titre incompatible avec la dignité humaine. Rien ne peut justifier cet esclavage moderne qui consiste à permettre aux hommes de disposer comme bon leur semble du corps des femmes en échange de quelques billets.

La plupart des Etats membres distinguent la prostitution « forcée » -la traite-, unanimement condamnée, de la prostitution « choisie », souvent normalisée et réglementée ouvrant ainsi de nouveaux marchés. Là où la prostitution est légalisée, comme aux Pays-Bas ou en Allemagne, la traite illégale se poursuit pourtant et le nombre de prostituéEs n’a pas baissé. Au contraire, des « entreprises du sexe » se développent tranquillement, entretenant en toute légalité les violences et stéréotypes machistes, et, dans plusieurs pays, dont la Belgique, les prostituéEs sont elles-mêmes réprimées et poursuiviEs pour racolage en rue.

La lutte contre la traite est utopique si elle ne s’inscrit pas dans une politique abolitionniste, menée de façon volontariste et coordonnée partout. Outre qu’elles doivent engager la responsabilité des Etats, les mesures abolitionnistes doivent garantir :

 La pénalisation des proxénètes mais aussi les clients, sans qui la prostitution n’existerait pas.

 Aucune forme de répression, de criminalisation ou de stigmatisation des prostituéEs.

 Du personnel et des moyens suffisants pour les services sociaux, et spécialement les associations et centres de lutte contres les violences hétéro-sexistes, qui puissent aussi assurer la prise en charge publique de l’accompagnement psychologique et social des ex-prostituéEs et l’élaboration de larges campagnes publiques qui luttent contre la stigmatisation sociale.

 Une sécurité d’existence et l’accès à l’emploi de qualité pour touTEs pour éviter le piège de la prostitution dans lequel s’engouffrent des jeunes filles par manque d’auto-estime, de perspectives ou de possibilités d’accéder à de réels emplois.

Comme la prostitution, la lucrative industrie du porno exploite et marchandise le corps des femmes sur base d’une conception viriliste de la sexualité. La pudibonderie de la société judéo-chrétienne qui ne met pas de mots sur la sexualité et l’hypocrisie d’un système capitaliste qui commercialise jusqu’à la dernière parcelle de dignité des ‘dirty débutantes’ conduisent à une situation où des actions physiquement nuisibles et à des rythmes intenables sont imposées en toute impunité aux actrices pornos pour la rentabilité de cette industrie. Dans les films de Disney, les enfants ne peuvent pas tourner plus d’une demi heure. Mais sur le tournage d’un porno, une fille (ou un garçon) peut être pénétréE de façon répétée, sans pause et après le lavement anal préalablement nécessaire à la scène. Dans l’Europe que nous voulons :

 L’interdiction de la production et la commercialisation des films pornos hétéro-sexistes, dégradants et dangereux pour les acteurs/trices

 les producteurs, réalisateurs et exploitants de ces films doivent être strictement pénalisés

 ces mesures doivent s’intégrer aux politiques publiques d’éducation à la vie sexuelle et affective, avec des campagnes d’information sur la réalité de l’industrie pornographique et le soutien à la réalisation et à la diffusion de productions culturelles, y compris sexographiques, qui respectent la dignité des acteurs/trices dans leurs conditions de travail et leur jeu de scène.

Depuis plusieurs années, l’épidémie du sida influence beaucoup les comportements sexuels et leur sécurité. Les femmes, les habitantEs du Sud, les toxicomanes, les prostituéEs, les prisonniers et les homosexuels sont particulièrement concernéEs par cette maladie. Mais la recherche et les soins en matière de santé sexuelle n’échappent pas à la logique du profit. Ainsi, la recherche se développe au profit des brevets privés et pas pour garantir la disponibilité de meilleurs traitements contre les maladies sexuellement transmissibles (MST). Ceux et celles qui en ont le plus besoins n’ont pas accès aux traitements existants, trop coûteux.

L’Europe que nous voulons garantira :

 le financement et le développement de la recherche, de la prévention et des traitements contre le sida dans le cadre de politiques publiques de santé qui garantissent l’accès aux soins pour touTEs.

 L’abolition de la propriété privée des brevets médicaux pour assurer la production et la distribution de médicaments génériques contre le sida et les MST.

7) Pour une vie sexuelle et affective émancipée !

Les normes patriarcales sont hétéro-sexistes ; en plus de maintenir des relations de pouvoir entre hommes et femmes en défaveur de ces dernières, elles ne conçoivent que les relations hétérosexuelles, brimant de fait notre liberté d’aimer et de vivre différemment du modèle dominant. Beaucoup de jeunes –et de moins jeunes- s’inspirent largement de l’hyper-sexualisation et des comportement machistes véhiculés notamment par les médias et reproduits dans les films pornos. Contre cette profusion de stéréotypes hétéro-sexistes et pour entraver la commercialisation de la sexualité et des corps, l’Europe que nous voulons imposera à charge des Etats :

 Le développement de politiques publiques d’éducation à la vie sexuelle et affective, concrétisées, avec la garantie de moyens et le personnel nécessaires, par divers centres et associations de promotion des droits sexuels et reproductifs et anti-violences.

 la promotion, à travers ces politiques publiques débarrassés des stéréotypes sur la famille et les rôles attribués à chaque sexe, de comportements variés, respectueux, non sexistes et épanouissants entre autres à travers des campagnes larges et coordonnées dans les médias de masse, les politiques publiques, les entreprises, …

Alors qu’il n’existe ni de « nature » ou de « gêne » de l’homosexualité ni de catégories figées mais bien une multitude d’identités et d’orientations sexuelles, les normes patriarcales et les résistances aux oppressions qu’elles génèrent construisent des catégories socialement définies : homo, hétéro, bi, trans, …. A travers plus de trente ans de mobilisations que les personnes LGBTI (Lesbiennes, Gays, Bisexuel/les, Transsexuel/les et Intersexes) ont pu se faire entendre et vivre à découvert. La plupart des lois discriminatoires ont été abolies et plusieurs Etats à garantissent diverses formes d’unions pour que soient reconnues les relations durables homosexuelles.

Mais ces conquêtes ne sont pas encore généralisées. Tandis que les stéréotypes et les préjugés hétéro-sexistes ont la vie dure, les persécutions et discriminations des personnes LGBTI n’ont pas disparu du territoire de l’Union européenne. Tous les jours, les personnes qui s’écartent du seul comportement hétéro acceptable sont discriminées à l’emploi, au logement, à la santé, etc, harcelées, violentées et tuées. Pour correspondre à la vision binaire et exclusive hommes/femmes, les personnes intersexes, qui naissent « ni fille ni garçon », sont niées, mutilées dès la naissance et gavées d’hormones toute leur vie. Sous l’influence de la doctrine réactionnaire du Vatican et d’autres intégrismes religieux, les droits fondamentaux de milliers de personnes sont ainsi quotidiennement niés. Les simples bonnes intentions ne suffisent plus.

L’auto-organisation et les luttes des personnes Lesbiennes, Gay, Bi, Trans et Intersexes (LGBTI) en tant que groupes discriminés sur base de leur identité et orientation sexuelle sont indispensables aux résistances globales contre toutes les formes d’oppressions et exploitations. Elles sont tout autant nécessaires à la construction de l’Europe que nous voulons, qui implique aussi la reconnaissance de la pluralité et le dépassement à terme des catégories sociales que les normes hétéro-sexistes sous-tendent. L’Europe que nous voulons doit garantir partout :

 Le droit à la protection légale contre les actes LGBTI-phobes, contre les propos attentatoires à la dignité, et les diverses formes de discrimination et de stigmatisation, ainsi que le droit d’asile politique pour les personnes LGBTI persécutées dans leurs pays d’origine.

 l’égalité des droits intégrale pour touTEs, indépendamment de l’identité et de l’orientation sexuelle

 L’autorisation et la facilitation du changement d’état-civil

 l’interdiction de la mutiliation des enfants intersexes au nom du droit à disposer de son corps et à l’autodétermination.

 L’abolition de toute pathologisation et psychiatrisation envers ceux et celles qui se trouvent hors des normes et qui ne sont pas malades pour autant ;

 L’interdiction des précisions hétéro-centristes dans toutes les lois concernant l’union, la parentalité, l’héritage ou la filiation, autant pour les couples que pour els personnes seules, sans pour autant valoriser le mariage et la famille comme institutions : les couples de tout genre doivent avoir le droit de partager chaque aspect affectif, légal ou sexuel avec les hommes et les femmes de leur choix ; le droit à la filiation automatique des enfants nés durant le mariage (ou la cohabitation légale) doit être garanti pour touTEs ; le ou la partenaire légalE doit pouvoir reconnaitre l’enfant néE ou adoptéE par l’autre durant l’union sans passer par de longues procédures administratives ; la procréation médicalement assistée doit être accessible à touTEs, sans entretiens psychologiques pour les couples homosexuelLEs.

 L’âge de la majorité sexuelle identique pour tous et toutes partout en Europe.

La place des femmes étant étroitement liée à la maternité et au foyer, les choix faits dans le couple hétéro impliquent souvent pour elles des sacrifices dans leur vie privée et professionnelle, ainsi qu’une dépendance économique vis-à-vis de leur conjoint ou compagnon. L’organisation interne du foyer peut amener la femme à ne pas exercer un métier, à travailler à mi-temps ou à accepter un salaire très bas pour maintenir les avantages des droits dérivés accordés à son conjoint.

L’union et le mariage sont alors de véritables pièges desquels il n’est pas toujours aisé pour les femmes de sortir sans s’enfoncer encore plus dans la précarité. Le droit au divorce est reconnu partout dans l’UE, sauf à Malte, avec des dispositions juridiques variables. Mais les conséquences d’une séparation ou d’un divorce pour les femmes sont peu prises en compte. Ainsi, elles se retrouvent souvent séparées ou divorcées sans revenus ou droits sociaux et elles représentent 85% des chef/fes de familles monoparentales, en tête de liste des personnes en risque de pauvreté. Au niveau financier, les prestations compensatoires dûes à l’ex qui a sacrifié sa vie professionnelle et/ou ses droits sociaux pour la famille ne sont pas garanties. Les femmes séparées ou divorcées ne sont pas non plus protégées de l’intrusion et du harcèlement d’un ex-mari ou compagnon violent. Au nom de la lutte contre un soi-disant « sexisme envers les hommes », les groupes de pères divorcés et autres lobbies masculinistes s’activent pour contester le paiement des pensions alimentaires ou revendiquer la garde alternée des enfants qui permet un maintien sous contrôle de l’ex-épouse ou compagne. Dans les pays où les lobbies masculinistes ont réussi à faire passer la garde alternée automatique en cas de séparation, le nombre de femmes maltraitées qui ont osé quitter leur mari a diminué, celles-ci ne pouvant accepter que leur enfant soit seul avec un homme violent une semaine sur deux.

Dans la décomposition des modèles sexués traditionnels qu’il revendique, le féminisme porte une dynamique qui encourage tant l’émancipation des femmes que l’abandon des préjugés hétéro-sexistes sur les rôles et comportements sociaux des femmes et des hommes. Dans l’Europe que nous voulons ;

 l’égalité dans la parentalité doit s’imposer dès la naissance des enfants, comme le partage des tâches entre hommes et femmes.

 le droit au divorce et aux pensions alimentaires doit être garanti

 les différents statuts fiscaux (mariéEs, divorcéEs, célibataires, …) doivent être abolis par une individualisation des droits.

 Les modes de garde doivent être adaptés au résultat d’une entente entre les deux parties ; la garde alternée ne peut être la règle automatique.

8) Leurs rosaires hors de nos ovaires !

Les droits sexuels et reproductifs sont fondamentaux, en particulier pour les femmes parce qu’ils conditionnent leur autonomie et donc l’exercice de tous leurs autres droits. Pourtant, plusieurs Etats de l’UE interdisent, limitent, ou veulent limiter fortement le droit à l’avortement. Là où il est légal et gratuit, il n’est jamais garanti intégralement. Souvent, il est conditionné à une période de réflexion ou à l’avis des médecins qui peuvent refuser de pratiquer une IVG et, en dehors du délai légal généralement de 12 semaines, l’avortement devient un crime. Le Conseil de l’Europe a récemment déclaré que l’avortement devrait être légal et accessible à toutes les femmes en Europe. Mais l’UE se limite à ces belles déclarations d’intentions sans conséquences, préférant s’effacer derrière les politiques de santé pratiquées par chaque Etat membre, tout en remettant en cause de fait les droits à la contraception et à l’avortement par ses politiques des restrictions budgétaires en matière de santé publique.

Cette attitude n’est pas étrangère à l’efficacité du puissant lobbying de l’Eglise catholique qui garde une grande influence sur les questions dites « éthiques » en Europe et dans le monde. Le Vatican, les courants religieux intégristes et la droite réactionnaire poursuivent main dans la main leur combat anti-avortement, sans rencontrer aucune résistance de la part de l’UE actuelle. En plus de partir en croisade pour le maintien de la « sainte fonction maternelle des femmes », le Vatican et ses amis s’attaquent tout aussi ardemment aux non-hétéros, jugéEs « contre nature », comme à la recherche scientifique et aux progrès médicaux, développant des arguments pour le moins douteux sur l’intervention divine dans l’apparition et l’agencement de la vie. Il est inacceptable et meurtrier de soumettre les femmes à l’esclavage d’une grossesse non désirée qui évolue dans leur ventre et se matérialise dans leur corps. Les enfants néEs dans de telles conditions survivent souvent dans un environnement peu propice à leur épanouissement.

Pour éviter les dérives réactionnaires que tous les intégrismes impliquent, l’Europe que nous voulons adoptera une politique pro-active en matière de défense des droits reproductifs et sexuels. Cela passe par la garantie, partout, de :

 la laïcité, pour une totale indépendance des politiques publiques par rapport aux religions

 La contraception et l’avortement assisté libres et gratuits. Qu’il s’agisse des délais, des démarches préalables ou du droit des mineures, les moyens d’appliquer la législation en matière d’avortement doivent être garantis pour que les femmes puissent décider par elle-même.

 L’exclusion totale de l’avortement de tous les codes pénaux. La reconnaissance d’un quelconque « statut de l’embryon » doit être proscrite de toute législation.

 Le soutien structurel, en personnel et en moyens, des centres de santé et de planning familial qui pratiquent les IVG, promeuvent et défendent les droits sexuels et reproductifs.

 La création de centres publics d’information sexuelle et contraceptive dans les écoles, les entreprises, les quartiers, les hôpitaux, etc

9) Une Europe construite par, pour et à l’image des peuples !

L’UE se targue de placer la promotion de l’égalité entre hommes et femmes parmi ses priorités, ce principe fondamental étant inscrit dans son Traité fondateur. Sous la pression des mouvements de femmes, l’UE a adopté dès les années 1970 des orientations favorables à l’égalité en matière d’emploi et de droit social. Elles se traduisent à travers de nombreux textes à l’application facultative et à travers quelques directives qui imposent des objectifs à atteindre et des règles à établir tout en laissant à chaque Etat le choix des moyens à utiliser.

Puisqu’elles évitent soigneusement d’imposer des mesures volontaristes et contraignantes à travers des lois uniques qui s’appliquent partout pour remplacer les législations nationales conservatrices et rétrogrades, ces orientations « favorables à l’égalité » aboutissent à des résultats concrets souvent plus que décevants et très inégaux entre les Etats. Ce que les gouvernements appellent « politique d’égalité » n’est d’ailleurs en réalité qu’un nivellement par le bas, qui impose de plus en plus les emplois précaires, les allocations insuffisantes ou l’allongement de la carrière pour toutes et tous. L’Europe que l’on nous impose reste ainsi à l’image de ceux qui l’ont conçue : un projet par et pour des hommes blancs de plus de 40 ans en costume gris et en bonne santé.

La composition des institutions européennes parle d’elle-même. Alors que la population de l’UE est féminine à 51,2%, le parlement européen n’est féminin qu’à 30%, la commission compte 8 femmes sur 27 commissaires, le comité économique et social totalise 24% de femmes parmi les 344 membres nommé/es par le Conseil des ministres et les différentes Cours de justice européennes sont toutes présidées par des hommes. Les institutions les plus impliquées dans l’exercice du pouvoir sont les moins féminines. La loi belge est l’une des rares en Europe à imposer la parité absolue sur les listes électorales pour favoriser la féminisation des institutions élues. Mais elle exige aussi que les deux premiers candidats soient de sexe différent et interdit donc de présenter deux premières candidates féminines.

Après plus de 200 ans de parlementarisme bourgeois masculin, les dispositions paritaires, mêmes si elles étaient élargies et systématisées, ne suffisent pas pour que la présence de femmes parmi les instances représentatives et décisionnelles corresponde réellement à leur proportion au sein de la population. Pour un changement dans ce sens, l’Europe que nous voulons garantira :

 le rétablissement sur les listes de candidatEs d’un déséquilibre numérique des hommes et des femmes… mais cette fois en faveur de ces dernières.

 l’interdiction, partout en Europe, des listes qui présentent deux premiers candidats masculins et de celles qui comptent une majorité de candidats hommes.

 un droit de regard et de veto d’institutions élues par les mouvements de femmes sur les décisions qui concernent ces dernières.

 La garantie de temps et de liberté pour que toutes et tous puissent s’impliquer dans l’action sociale, syndicale et politique.

Seul un puissant mouvement des femmes peut imposer des changements radicaux pour en finir avec le patriarcat et avec cette Europe du Capital, antidémocratique et illégitime. Une véritable égalité ne peut se concrétiser qu’à travers une toute autre Europe, construite par, pour et à l’image des peuples.

10) Pour l’émancipation : un mouvement des femmes autonome, large, unitaire, antiraciste et internationaliste !

Le capitalisme utilise le patriarcat pour diviser les travailleurs et les travailleuses, pour imposer toujours plus de flexibilité, pour faire pression sur les salaires ou pour démanteler la sécurité sociale et les services publics. Il est illusoire de tenter d’atteindre l’égalité entre hommes et femmes dans un tel système. Mais la rupture avec le capitalisme ne suffit pas non plus pour balayer le patriarcat puisque les stéréotypes hétéro-sexistes sont tenaces… même chez les révolutionnaires.

Souvent, les luttes féministes sont considérées comme secondaires, éludées, voire contredites par d’autres causes tout aussi justes comme l’anti-racisme par exemple qui, au nom d’un relativisme culturel, peut minimiser ou passer sous silence des comportements machistes inacceptables. C’est en s’auto-organisant au sein d’un puissant mouvement féministe autonome que les femmes peuvent identifier leur oppression spécifique sous toutes ses déclinaisons, dégager des stratégies et perspectives pour la combattre efficacement et faire reconnaître leur légitimité par les autres mouvements sociaux pour mener des luttes conjointes et solidaires dans une perspective réellement égalitaire et émancipatrice.

A l’inverse, le féminisme dominant est blanc et élitiste. Il ne mesure pas toujours les réalités des femmes les plus précaires. Il véhicule aussi parfois des préjugés et stéréotypes à travers sa perception des femmes du Sud et des femmes d’origine étrangère habitant au Nord. Pour soutenir l’émancipation de toutes, le mouvement des femmes doit se démocratiser, se « patchworkiser ». Ca implique qu’il soit large, pluraliste, unitaire, antiraciste et internationaliste, et qu’il encourage en son sein l’auto-organisation de toutes les femmes à partir des réalités contrastées qu’elles vivent. Pour dépasser les clivages, il est nécessaire d’avancer ensemble sur les points de convergences et de transformer les idées divergentes en apports constructifs qui alimentent les débats et expériences féministes. Hétéros, homos, croyantes pratiquantes, mères de famille, célibataires endurcies, … peu importe : les femmes doivent construire des solidarités qui vont au-delà de la peur de l’autre, car c’est sur notre division que le capitalisme compte pour nous asservir.

Cette Europe antisociale, antidémocratique, anti-écologique et sécuritaire est un noeud d’incohérences destinées à soutenir le profit capitaliste au détriment des droits élémentaires de la majorité sociale et particulièrement des catégories opprimées et discriminées par leur sexe, leur orientation sexuelle, leur culture, leur religion, leur couleur de peau, leur handicap, leur âge, …. Cette Europe veut que les femmes travaillent sans limites, avec un bas salaire, dans la flexibilité horaire la plus inconfortable, tout en s’occupant des enfants, en se déplaçant en voiture (sans émettre de gaz à effets de serre pour ne pas porter la responsabilité du désastre climatique qui s’annonce), sans recevoir d’allocations sociales (pour ne pas « profiter »), sans faire l’amour (cela ne lui amènera que des ennuis), en prenant bien en charge l’économie non-monétaire pendant que les hommes triment (aussi) pour produire des objets dont personne n’a besoin et qui finiront à devoir être incinérés dans des centres de tri. Le seul fil rouge de toute cette absurdité est l’argent qui finit dans la poche des grands actionnaires. Il est temps que nous arrêtions de jouer leur jeu.

Pour en finir avec l’Europe patriarcale et capitaliste, il s’agit de mener, toutes et tous, dès aujourd’hui, un combat quotidien et simultané contre le patriarcat, contre le capitalisme et contre toutes les formes de discrimination et d’oppression. La révolution n’est pas une utopie, c’est une nécessité, une condition de survie. Pour les femmes en priorité.